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Primaire de la gauche: ne pas se tromper sur les enjeux - David Tessier - 13

La proposition récemment lancée par un appel paru dans Libération de l'organisation d'une primaire à gauche provoque un débat logique dans le PCF et en dehors de ses rangs. Ce débat est important : une telle « élection » interroge non seulement le fonctionnement et l'organisation du Parti, mais surtout la légitimité de sa forme organisée, autant dire son existence.

Il ne s'agit pas de savoir si les communistes doivent obligatoirement présenter un candidat à chaque élection présidentielle, cette question a déjà été tranchée plusieurs fois (1974, 2012).

Le problème posé est différent : il est de savoir qui a autorité ou légitimité pour prendre une telle décision. En 2012 ce choix est revenu aux militants du PCF, qui par un vote souverain ont choisi entre plusieurs possibilités de soutenir un candidat qui devenait de ce fait le candidat commun de plusieurs organisations. Rien de tel dans le cas d'une primaire : les électeurs qui se prononcent appartiennent ou pas à des partis différents, ou à d'autres organisations, ou bien ne sont organisés nulle part. Les militants du PCF s'engagent donc dans une démarche dans laquelle le Parti en tant qu'organisation s'efface.

En effet, il ne pourrait y avoir de primaire avec un candidat communiste unique, puisque le principe de la primaire consiste précisément à rompre le lien entre les candidats et les organisations. On peut donc parfaitement imaginer dans le cadre d'une primaire plusieurs candidats « d'origine communiste » dont aucun ne serait investi par le Parti qui du coup ne donnerait aucune consigne de vote, chaque voix comptant pour une.

La même logique se retrouve en bout de chaïne : le principe d'une primaire est que la décision finale majoritaire s'impose. Mais comme on ne peut pas plus récuser une candidature qu'on ne peut faire « marche arrière » (refuser de faire campagne pour le vainqueur de la primaire), on peut tout-à- fait se retrouver dans la situation paradoxale de devoir faire campagne pour quelqu'un qu'on aura combattu politiquement pendant toutes la durée de la campagne.

Car il y bien une campagne. Pas un débat entre militants, une véritable campagne : affiches, tracts, débats, etc. Ce qui modifie tout : qui peut croire un seul instant que le militant lambda et inconnu qui vit et travaille à Brest disposera d'un appareil électoral lui permettent de s 'exprimer à Nice ? On voit bien que ne seraient candidats que ceux qui auraient les moyens d'assumer une campagne (y compris financiers), c'est à dire ceux qui pourraient s'appuyer sur une organisation, sauf que, cette organisation ne serait pas un parti.

Et que faire dans ces nouvelles conditions des législatives ? Des primaires par circonscription ? Et dans ce cas nous nous y plierions par principe (ainsi qu'au résultat) là où nous sommes sortants ?

 

Une primaire « à la française «  télescope donc deux héritages : l'héritage « mouvementiste » français, puisque elle conduit de fait à la disparition du Parti au profit de l'expression individuelle de militants qui construisent un nouvel objet politique autour de la personne d'un candidat, qui du coup a une organisation à son service et non plus l'inverse, et l' inspiration Etatsunienne qui fournit le modèle.

Nous somme donc face à un choix stratégique. Il ne s'agit pas seulement de refuser ou d'accepter qu d'autres que les communistes puissent choisir à leur place, ou de s'interroger sur la qualité démocratique d'une machine électorale qui fonctionnant en « staffs » de campagne (élus par qui ? Rendant des compte à qui ? Financés comment?) transforme les militants en supporters, il s'agit de savoir si nous voulons continuer à avoir un parti révolutionnaire ou si nous voulons devenir une composante d'un mouvement.

La situation n'est évidemment pas simple, et la décision unilatérale prise par Mélenchon et le PG de s'autoproclammer homme providentiel (ou sauveur suprême, comme on voudra), ne contribue pas à sa clarification. Nous sommes pris dans ce qui est à la fois un piège et une contradiction politique (dans laquelle nous portons une responsabilité, même si ça n'est pas le sujet de la présente contribution) : il nous faut échapper à la fois au piège de l'effacement de notre Parti dans une coalition opportuniste, et à la tentation sectaire du repli identitaire. Les mois qui viennent doivent permettre d'ouvrir un large débat dans le cadre de la préparation du congrès sur cette question.

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