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A propos du projet de base commune du CN - Pierre Bachman - 13

Tout d'abord il y a des questions de forme qui sous-tende probablement une pudeur ou une crainte à afficher d'emblée ce que nous voulons. Nous n'échappons pas à la sempiternelle litanie des descriptions des situations qui nous assaillent ! Quand aurons-nous la culture d'aller directement au but de ce que nous voulons parce que nous sommes conscients que nous le valons ! Si nous sommes communistes ce n'est pas uniquement pour riposter aux vilenies que subit le peuple, mais c'est pour changer la donne d'un système d'aliénation et d'exploitation. Henri Malberg dans sa contribution, dans ses publications et dans ses expressions insiste sur cette nécessité qui devrait être presque notre affichage identitaire principal.

Conséquence de cette « pudeur » : nous n'insistons pas assez sur l'interpellation de chacune et de chacun de façon à ce que toutes les personnes puissent reconquérir la liberté et la confiance en elles-mêmes pour affirmer ce qui leur paraît nécessaire. C'est le nécessaire, le souhaitable que nous voulons voir porter par les citoyennes et les citoyens sur le devant de la scène sociale et politique pour construire ce que nous appelons maintenant « les communs ». Chaque personne est la mieux placée pour exprimer cela à condition qu'elle sorte de l'inhibition dans laquelle l'idéologie dominante la confine sur le registre « tout ceci c'est bien beau, mais ce n'est pas possible ».

Cette incapacité à faire claquer « le nécessaire » ne permet pas d'exploiter les potentialités décrites dans le texte du Conseil National, ne va pas à la rencontre de nos propositions qui pourtant « sont possibles » ! Notre parti a donc la responsabilité urgente de faire éclater cet enjeu stratégique qui sous-tend un changement de comportement et de rapport à la politique pour la population car le nécessaire de chacune et de chacun, si nous contribuons à le faire exprimer de façon intelligente, n'a rien à voir avec les horreurs populistes des fascistes de tous bords regroupés dans le Front National.

Ensuite il y a, à mon sens, des questions théoriques qui handicapent notre visée, notre stratégie et nos propositions.

Sur les mots ou les concepts utilisés, nous avons à faire un gros effort de précision, de contenu et de partage des sens pour plus de rigueur. Pour mieux signifier ce que nous voulons, ce que nous proposons comme futur. La difficulté étant d'exprimer ce futur avec les mots ou les concepts du passé. Le risque est grand d'y rester enfermé. Inversement, sous prétexte de novation il ne faut pas dire ou faire n'importe quoi avec la langue soi-disant moderne : elle conduit à des impasses et à des désillusions. Par exemple : « faire de la politique autrement », c'est moderne mais à mon sens, après 20 ou 30 ans de répapillage de cette phrase, je pense qu'elle n'a pas de sens. C'est une fuite en avant car la question de fond n'est probablement pas là. Inversement se « recentrer sur nos fondamentaux » ou sur notre « identité » peut aboutir au rabougrissement de la pensée et de l'activité incapables d'appréhender le réel d'aujourd'hui et ses évolutions futures. Incapacité à anticiper, incapacité à écouter et à restituer du sens politique dans une direction émancipatrice. Dans le même ordre d'idées il faut avoir plus de rigueur dans l'usage et le sens du mot « partage ». En particulier « partager les richesses » est certes légitime mais relativement superficiel et sans avenir. L'enjeu fondamental est de « prendre pouvoir » sur leur création pour décider de ce que nous voulons faire, comment, pour qui et donc in fine partager.
Nous avons une conception de la démocratie encore beaucoup trop institutionnelle. La démocratie est un vaste tout, un ensemble qui intègre par exemple la qualité des droits sociaux, des sécurités sociales dont jouissent les personnes. Sans ces sécurités il ne peut y avoir de démocratie. Voir de ce point de vue les travaux du prix Nobel d'économie Amartya Sen.
C'est sur la conception et la place du travail que j'ai les plus fortes réserves avec le texte. Il n'est en effet abordé essentiellement que sous l'angle de l'emploi, de sa fonction exploitée, aliénée par le rapport de subordination que le patronat et les forces politiques rétrogrades ont tendance de plus en plus à faire évoluer vers un rapport de soumission. Ainsi on assiste à un glissement du droit du travail vers le droit civil et du salariat vers le contrat de louage de services. En procédant ainsi, et en ravalant le travail pour l'essentiel à la production économique on oublie qu'il est en fait bien plus large que l'emploi ! Le travail, avec la pensée et le langage son fondateur des caractères de l'être humain. Le travail doit être une donnée anthropologique. Dans l'emploi il a été tellement transformé que le labeur, les métiers, les qualifications sont devenus des « gros mots » au bénéfice du management, de l'employabilité et du consumérisme au sens des travaux de Michel Clouscard. C'est là que se trouvent l'origine et le cœur des régressions idéologiques que nous sommes bien plus performants a repérer hors du travail. Il n'y aura pas de sortie de crise, de changements de société sans placer au cœur du processus le travail pour créer « la civilisation du travail » alors que depuis des siècles nous sommes dans celles de son exploitation. Certes, il est légitime est urgent de maîtriser les flux financiers, les usages monétaires et les systèmes productifs et de défendre le droit du travail tel qu'il existe aujourd'hui. Mais sans révolution du travail, sans nouvelles dynamiques de celui-ci dans les processus de production, de la vie, de la création, il n'y aura pas de transformation au niveau que nous la souhaitons. Il n'y aura pas dépassement du capitalisme. Il y aura simplement, peut-être, un pas pour des régulations nouvelles qui aussitôt seront remises en déclin au gré des rapports de force. Régulations nouvelles ou rupture avec le système actuel nécessitent des rapports de force extrêmement élevés. Alors, pour les rendre féconds et en élever le niveau ne vaut-il pas mieux sortir de l'idée de régulation, de transformation « graduelles » pour affirmer que les fonctions d'employeur n'ont plus lieu d'être, qu'elles doivent être mises en déclin au bénéfice de celles d'entrepreneur, de travailleur de créateur. Il faut reconnaître à chaque personne des capacités et les droits correspondants, y compris un salaire pour la vie, en élargissant le travail à toutes les activités la constituant. C'est la raison pour laquelle je propose la mise en place d'une sécurité sociale du travail qui « couvrirait » l'ensemble des personnes sortant du système éducatif obligatoire et qui gérerait de façon dynamique, intelligente et coopérative les qualifications nécessaires aux systèmes productifs avec comme branche particulière pour cela, la sécurité sociale professionnelle conçue par la CGT. Au-delà, pour le travail ménager, le travail actuellement qualifié de bénévole, celui des retraités etc., Il serait créé des dispositifs spécifiques reconnaissant leur efficacité sociale en les rémunérant en tant que tels. Il existe des exemples (que le patronat a détruits ou veut détruire) d'embryons de tels systèmes échappant à la dictature des employeurs : outre la fonction publique, le statut des intermittents du spectacle, l'ancien statut des dockers. Si l'on veut socialiser les systèmes productifs et financiers, il faut confier le pouvoir de décider aux créateurs de la richesse. Il faut leur permettre de réel choix et établir des dynamiques qui permettent à tout le monde, chez soi, dans le monde économique, dans le monde de la création ou scientifique etc. de travailler avec plaisir et de contribuer à l'aventure commune de la construction d'une nouvelle civilisation.

Enfin dernière remarque : à mon sens, il ne s'agit pas seulement de mentionner au détour d'une phrase « l'efficacité sociale ». Il aurait été bon de travailler ce concept qui doit surdéterminer l'ensemble de notre démarche contre les rentabilités financières. Il ne s'agit pas simplement d'opposer un « critère de gestion » à un autre mais beaucoup plus largement, une culture à une autre. Il s'agit de changer de paradigme dans la conception des activités humaines. Un travail considérable et à reprendre sur ce sujet. Il aurait été bon de le signifier dans le projet. Ceci d'autant plus qu'à mon sens, le nouvel affrontement de classe passe entre celles et ceux qui ont intérêt à l'efficacité sociale des activités humaines et le 1 % restant qui a intérêt à l'exacerbation des rentabilités financières même si ce 1 % est servi par une pléiade de serviteurs.
 

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