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Projet : comment organiser le travail dans le parti ? Marine Roussillon - 75

Le débat politique est de plus en plus consensuel : tout le monde s’inscrit dans le cadre du capitalisme libéral et la seule solution apportée à la crise, à droite comme à gauche, c’est l’austérité. Même l’opposition entre une version libertaire et une version autoritaire du libéralisme n’a plus cours depuis que le gouvernement a repris à son compte les propositions du Front National sur la réduction des libertés publiques. Dans ce contexte, il est urgent de faire entendre un projet politique cohérent de rupture avec l’austérité, apportant des solutions progressistes à la crise et visant à dépasser le capitalisme.

1. Quels objectifs pour le travail sur le projet ?

Cette clarification de notre projet est à l’ordre du jour de notre prochain congrès. Mais nous devons aussi nous doter de dispositifs de travail durables permettant d’articuler l’élaboration du projet communiste (et des propositions dans lequel il se décline) et le travail, avec d’autres, à un projet de gauche pour la France (et à sa traduction en propositions). L’un et l’autre ne se confondent pas. La reconstruction d’une perspective de gauche ne doit pas nous faire perdre de vue le projet communiste. Mieux : si nous voulons que cette perspective de gauche devienne majoritaire, nous devons lui donner un contenu de classe. L’articulation de ces deux perspectives est donc essentielle.

Elle implique :
- premièrement, que nous nous donnions les moyens d’associer dans la durée des acteurs du mouvement social, des salariés, des intellectuels et des créateurs à notre travail, sans pour autant mettre en cause la souveraineté des adhérents du PCF : cet objectif est d’autant plus important que des franges de plus en plus grandes du monde syndical et intellectuel sont en rupture avec le parti socialiste et cherchent des interlocuteurs politiques ;
- deuxièmement, que nous travaillions à partir d’axes stratégiques permettant la mobilisation des militants sur tout le territoire : c’est d’autant plus important que la réduction de nos moyens et du nombre de nos élus met en danger notre ancrage national ;
- enfin, que nous mettions en avant des batailles permettant de réaliser l’alliance entre les couches les plus populaires du salariat et les couches moyennes, que les politiques libérales cherchent au contraire à diviser. Réaliser cette convergence dans des combats précis nous sera utile pour construire la majorité nécessaire à la prise de pouvoir.

On le voit, le travail sur le projet ne peut donc pas être simplement un travail d’élaboration ou d’approfondissement théorique – même si ces démarches sont utiles. Il doit impérativement s’emparer de la question stratégique : quels axes de projet faut-il mettre en avant pour construire des majorités et prendre le pouvoir ? Il ne s’agit pas de dire ce qui est le plus important dans le projet communiste, mais de définir ce qui, dans le contexte actuel, est le plus audible : ce qui nous permettra d’être identifiés, de rassembler et de gagner. Quelles sont les positions clivantes, que nous sommes les seuls à porter et qui permettent de nous identifier ? Quelles sont les batailles qui peuvent nous permettre, dans l’année à venir, de réaliser l’alliance entre les couches les plus populaires du salariat et les couches moyennes cultivées ?

2. Intérêts et difficultés du travail en réseaux

Les secteurs de travail du parti sont nombreux et ont des fonctionnements très divers. Les lignes qui suivent sont inspirées par mon expérience d’animation du réseau école : sans doute les choses se passent-elles différemment dans d’autres secteurs et les problèmes ne sont pas partout les mêmes.

Le réseau école a la spécificité de fonctionner en « réseau » : lorsque j’ai commencé à y prendre des responsabilités, aux côtés de Stéphane Bonnéry, il s’agissait d’une vaste liste de contacts, mêlant différents acteurs de l’éducation, pas tous membres du parti. Depuis, nous avons fait un effort d’organisation : en plus de ce vaste réseau (plus de 2000 contacts), nous avons cherché à implanter le secteur école dans les fédérations (avec une quarantaine de responsables fédéraux sur ces questions) et à créer un groupe de travail restreint réunissant ces animateurs fédéraux, les membres du Conseil national intéressés par ces questions et quelques militants syndicaux, associatifs ou pédagogiques prêts à s’investir et dont l’apport nous apparaissait comme essentiel.

Ce fonctionnement idéal pourrait être particulièrement intéressant. Il permet d’agréger au travail d’élaboration des positions du parti des personnes qui ne sont pas prêtes à s’engager à nos côtés, mais qui veulent se battre sur une question précise ; il inscrit ce travail commun dans la durée, lui donne à la fois de la continuité et de l’efficacité, ce qui nous manque souvent. En même temps, il ne met pas en danger la souveraineté des communistes : en théorie au moins, les secteurs de travail ne sont pas des organes de direction : leur rôle est de nourrir la réflexion du parti et d’instruire les débats, pas de prendre des décisions.

Cependant, la mise en place d’un tel fonctionnement se heurte à plusieurs obstacles : le manque de moyens d’abord – manque de dirigeants prêts à s’investir dans un secteur de travail, de temps pour se réunir, de collaborateurs pour préparer les réunions et les rendre plus efficaces... – et le défaut de lien avec les directions ensuite. Trop souvent, les secteurs de travail se substituent aux directions dans la prise de décisions qui engagent le parti. Ainsi, lorsque le gouvernement a mis en place la réforme des rythmes scolaires, c’est le réseau école qui a rédigé les premiers communiqués du PCF et les modèles de tracts sans qu’aucune instance de direction ne discute ou ne valide sa position. Ce n’est pas un cas isolé.

Ce mode de fonctionnement pose des problèmes importants.

Le premier est un problème de légitimité : il est bien plus difficile de travailler à l’appropriation des prises de position d’un secteur dans le parti quand ces prises de position apparaissent comme le fait d’un petit groupe, et non comme le résultat du travail et du débat d’une direction élue. Un seul exemple : lorsque Vincent Peillon a présenté sa loi de refondation de l’école, le réseau école a fourni un important travail d’analyse et de contre propositions, qui l’a amené à se prononcer contre le projet de loi du ministre. Mais la direction nationale du parti (CN ou CEN) n’a jamais débattu de ce projet. Lorsque la loi a été soumise à nos députés, le groupe à l’Assemblée nationale a voté pour, donnant ainsi l’impression que les communistes étaient favorables à la loi de refondation. Un débat de direction, nourri par les travaux du réseau, n’aurait peut-être pas permis d’éviter ce vote : il aurait au moins rendu possible l’expression, au niveau national comme au niveau local, d’une position du PCF.

Le deuxième problème est un problème de cohérence : aucune instance de direction n’assure la cohérence des prises de positions des différents secteurs. Non seulement les positions des secteurs ne sont jamais validées par une instance de direction, mais même les communiqués de presse rédigés par les responsables de secteurs et mis en ligne sur le site du parti ne font l’objet d’aucune procédure de validation politique. Le plus souvent, c’est l’initiative individuelle des responsables de secteurs qui permet d’éviter la cacophonie. Parfois, le parti est amené à prendre des positions contradictoires : ainsi lorsque le PCF s’est retrouvé signataire de l’appel au meeting du 6 mars 2015 « contre l’islamophobie », aux côtés d’organisations (notamment l’Union des Organisations Islamiques de France) que nous combattons par ailleurs dans le cadre de la lutte féministe ou de nos prises de positions pour la laïcité à l’école.

Cette situation a pour corollaire un fort sentiment d’inutilité chez les camarades investis dans mon secteur de travail : l’impression domine que le parti ne s’empare pas du travail produit, et que nous ne nourrissons pas la réflexion des directions. Ce sentiment est d’autant plus fort que nombre de personnes qui travaillent avec nous – syndicalistes, chercheurs, militants pédagogiques – ne sont pas adhérentes du PCF. Elles ont rejoint le réseau parce qu’elles veulent faire bouger les politiques éducatives, mais ne sont pas prêtes à s’investir dans un parti politique. Elles n’ont donc aucune prise sur les débats du parti, et sont d’autant plus frustrées de voir le peu d’utilité de leur travail.

3. Organiser les relations entre les secteurs de travail et les directions

Nous ne pouvons pas nous contenter d’une situation où les échanges entre secteurs de travail et directions reposent essentiellement sur les conversations dans les couloirs de Fabien, la capacité de chaque responsable à passer un coup de téléphone à la bonne personne au bon moment... Donnons-nous des règles pour que le travail des secteurs nourrisse les débats des directions :
- chaque secteur de travail pourrait avoir l’obligation de produire une note par trimestre à direction du CN pour faire le point sur les enjeux d’actualité ;
- chaque réunion du CEN pourrait être alimentée par une ou plusieurs notes de secteurs sur l’actualité, notes commandées la semaine précédente par le CEN ou la coordination ;
- les communiqués publiés sur le site du PCF pourraient être soumis par voie électronique aux membres du CEN ou de la coordination ;
- les prises de position qui suscitent un débat devraient alors être soumises à la discussion du CEN, ou du CN.

Repenser l’organisation des secteurs de travail pour leur donner mieux les moyens de travailler. Notre parti s’est doté de secteurs de travail très nombreux (près d’une vingtaine à l’issue du dernier congrès), qui fonctionnent de manière très inégale, avec des moyens divers (animateur salarié par le parti, collaborateurs...). Repenser l’organisation des secteurs de travail en favorisant l’émergence de « pôles » coordonnant l’activité de plusieurs secteurs permettrait de renforcer la cohérence de nos prises de position, de faciliter le travail sur les éléments transversaux de notre projet et de donner à plus de secteurs les moyens de travailler. Cela impliquerait de penser les intitulés des secteurs non pas en fonction d’une tradition ou des personnes à qui l’on veut donner des responsabilités, mais en fonction des besoins réels du parti et des problèmes qui structurent aujourd’hui la vie politique.

4. Vers un pôle « savoirs, culture, création » ?

Pour ce qui concerne le réseau école, on pourrait ainsi envisager la création d’un pôle « Savoirs, culture, création », coordonnant les travaux du réseau école, du secteur enseignement supérieur – recherche et de la commission culture (ainsi que ceux des groupes de l’ANECR ou de la commission économie qui s’intéressent à la formation continue) – voire des secteurs média et sport. Il ne s’agit pas de diluer l’un ou l’autre de ces secteurs – qui tous fonctionnent bien à l’heure actuelle – mais de gagner en cohérence, en efficacité et en visibilité.

D’abord, un tel pôle permettrait de travailler mieux encore la cohérence des positions du parti face à la place nouvelle des savoirs, de l’information et de la création dans la lutte des classes. Les quelques expériences de travail commun réalisées ces dernières années sous l’égide du comité du projet (atelier commun à la convention du projet et à la convention Europe notamment) ont montré que les problématiques travaillées par ces secteurs sont largement les mêmes, même s’il est bien sûr nécessaire de les décliner en fonction de l’actualité des différents champs concernés.
Les savoirs et la création dans la lutte des classes.
Les réformes libérales visent de plus en plus l’éducation et la culture dans un même mouvement, et cherchent même de plus en plus souvent à les mettre en concurrence (que l’on pense à la réforme des rythmes scolaires ou à celle du collège). Enfin, les solutions à la crise culturelle que nous traversons passent à la fois par l’école, par l’université, par la recherche, par l’art et par la culture : tous ces champs doivent contribuer à la construction et à l’appropriation par tous d’une culture commune ambitieuse et émancipatrice.

Ensuite, il permettrait de mutualiser les moyens pour travailler et de gagner en efficacité. Souvent, nos élus ont déjà à traiter à la fois les questions d’éducation, d’enseignement supérieur, de recherche et de culture. Dans les fédérations, il n’y a pas toujours assez de forces disponibles pour dégager un responsable sur chacune de ces questions : il serait sans doute plus simple d’avoir un référent, voire même un collectif de travail, dans chaque fédération avec un fonctionnement par « pôle ». Nous gagnerions ainsi en efficacité sur le terrain. Et s’il n’est pas possible, dans l’état actuel des finances du parti, de doter chacun de nos vingt secteurs de travail d’un collaborateur, peut-être qu’un pôle réunissant plusieurs secteurs pourrait se partager un collaborateur.

Enfin, il constituerait une réponse au décrochage de plus en plus net entre les intellectuels (enseignants, chercheurs, artistes...) et le parti socialiste.
 

Il y a actuellement 0 réactions

  • comment organiser le travail dans le parti ?

    Très intéressant et constructif.

    Par HUMBERT, le 19 March 2016 à 19:44.

  • Difficultés du travail en réseaux et du travail en commun

    Bonjour,

    Je partage assez le § selon lequel il existe "un fort sentiment d’inutilité chez les camarades investis (...): l’impression domine que le parti ne s’empare pas du travail produit, et que nous ne nourrissons pas la réflexion des directions", avec 2 exemples :

    - Le dossier des emprunts toxiques Dexia : ce n'est pas faute d'avoir travaillé localement la question (St-Gratien)et d'avoir mis à disposition de notre fédération (95) nos expériences très concrètes, réflexions, pistes de réformes législatives, mais également avoir fait savoir notre disponibilité à l'ADECR 95, ou encore auprès de l'ANECR pour rendre compte et exposer nos enseignements... un dossier pourtant complètement en lien avec la campagne sur le coût du capital...

    - Autre exemple, sur le thème de la refondation de l'école et plus exactement des Temps d'Activités Périscolaires (T.A.P).Des expériences ont été menées localement avec succès parfois là, dans des mairies détenues par le PCF, ou bien à participation communiste.Des expériences ont été aussi moins fructueuses ici. Il aurait été intéressant soit de lancer un appel à une mutualisation, ou mieux, de se saisir de contributions spontanées remontant du terrain, au moment où actuellement (importance de la réactivité...) se re-décident les prochains P.E.D.T (= projets éducatifs territoriaux), 3 ans après la mise en place de la réforme des rythmes scolaires, afin que localement, le PCF puisse avancer rapidement sur ce thème des propositions palpables comme par exemple celui d'un "nouveau service public du périscolaire", proposition complètement en lien avec l'actuelle campagne sur l'emploi...

    Deux exemples de batailles qui auraient pu "nous permettre, dans l’année à venir, de réaliser l’alliance entre les couches les plus populaires du salariat et les couches moyennes cultivées"...

    Par Renaut Baphèse, le 19 March 2016 à 19:26.

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