Les congrès du PCF

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Proximité, démocratie, rigueur : des cellules au service d'un parti de masse - Simon Lahure - 49

Les formes classiques d'engagement politique (adhésion, militantisme) sont en désuétude. La défiance envers la politique est plus forte que jamais, et s'explique par deux facteurs : une assimilation entre politique et jeu politicien, et un éloignement de la politique.

Le jeu politicien consiste à produire un effet médiatique plus qu'à la construction d'un discours politique. Si les médias deviennent le lieu de popularisation d'une personnalité politique, dialectiquement, les candidats vont s'adapter à ces nouvelles exigences en provoquant, pour accroître le buzz. La mise en valeurs de bisbilles interne accroît l'idée que la politique est un jeu de pouvoir personnel, où le but est d'écraser son voisin pour une gloire personnalisée.

La politique n'est plus vue comme un élément constitutif d'un vivre ensemble décidé collectivement. La politique est identifiée comme le jeu de notables, éloignés du quotidien vécu dans un quartier populaire. La politique est donc vue comme excluante : le fait de la réserver à une élite provoque un sentiment d'incompétence politique pour les classes populaires. Ce sentiment d'incompétence s'exerce de manière dialectique avec le désintérêt, dans un processus où l'un nourrit l'autre.

Le rôle d'un parti populaire est de déconstruire ce schéma social à la fois par le contre-exemple et par une pratique révolutionnaire. L'exemplarité des camarades placés en responsabilité est un vecteur de démocratisation de l'accès à la politique : rien n'est inné, tout est acquis et peut être acquis par tous. L'ancrage dans le réel illustré par l'adage « tout est politique » permet quand à lui de montrer que « c'est possible ». La politique n'est pas une chasse gardée de techniciens ou de théoriciens.

Transformer ces objectifs politiques internes nécessite des outils et des structures. Une structure sociale est inhérante à toute vie sociale, mais ce qui est novateur dans l'organisation d'un parti de masse est le fait d'avoir la main sur ces structures sociales, de choisir plutôt que de subir. A ce titre, le Parti a fait le choix de se doter d'outils de proximité : les cellules. La cellule est d'usage un découpage de la section à partir du moment où elle atteint une taille critique. En dehors de l'usage, il paraît nécessaire de penser la cellule. Qu'est-ce qu'une cellule ? Pourquoi mettre en place des cellules ? Comment mettre en place une cellule ? Autour de cette problématisation s'établissent des premières réponses qui peuvent participer à choisir notre structure plutôt que de la subir.

 

Militer au plus près des gens

 

Le militantisme de proximité est nécessaire, puisqu'il a vocation a déconstruire les deux principaux stéréotypes sur la politique. La politique n'est ainsi pas l'activité de personnalités médiatisées, mais de voisins, de gens que l'on croise en allant faire ses courses, en se rendant au travail, qui vivent des réalités similaires aux nôtres et que l'on peut associer dans de petites campagnes extrêmement concrètes. Il n'est plus question de jeu politicien, mais d'une gestion collective de la cité. Plus qu'un acteur politique, le parti est un acteur social : un biais de socialisation politique, tout comme l'école, la famille ou l'entreprise, mais qui obéit à une codification différente. Ce qui compte n'est pas le capital culturel, mis en valeur par la joute verbale, mais le fait de faire avec tous. L'écoute prends alors une place fondamentale, non parce que « les gens savent déjà ce qu'il faut faire », mais parce que le parti peut structurer l'indignation et en faire une force politique.

Cette structuration de proximité qui permet de s'investir politiquement à l'échelle de son quartier a un nom : la cellule. Il s'agit donc de voir comment, pourquoi et dans quel but nous pouvons initier ou dynamiser des cellules partout sur le territoire.

 

Proximité

Au fur et à mesure de la mise en route du cadre politique que représente la cellule, c’est un véritable cadre de socialisation qui se met en place. Cette nouvelle structure sociale peut être maîtrisée, c'est à dire être de manière consciente source d'acquisition d'un capital culturel et politique. En d'autres termes, au cadre formel symbolisé par la réunion et les activités militantes s'ajoute de fait un cadre informel de discussions, d'échanges parfois plus riches que les réunions. A partir d'un vécu, d'une difficulté administrative, d'une menace par EDF de couper l'électricité en décembre, se structure de manière inconsciente des réponses politique et une mise en confiance de chacun qui permet de s'affirmer face à une société qui répond techniquement, et non politiquement, à toutes les contestations individuelles. Mettre ceci en place correspond à l'instauration de temps informels, autour d'un repas ou d'un apéritif. Le lieu de réunion, semi-formel, est important pour démocratiser la vie politique : dans l'appartement de camarades, et de manière tournante afin que chacun s'approprie le fait d’accueillir les espaces de vie de la cellule. De la même manière, dans chaque quartier peut s'identifier des lieux d'actions, qui sont des centre de passage, d'emploi ou de vie. Troquets, marchés, entreprises, porte à porte : tout peut se prêter à l'action politique. Afin d'optimiser l'aspect de proximité de la cellule, l'investissement dans la vie associative locale peut être une option pertinente. Le rôle de l'organisation d'une section en est transformé pour assurer le suivi et la mise en dynamique des cellules.

 

Démocratie

Répondre à une novation de la vie politique est aussi réhabiliter une nouvelle forme de démocratie. Pas une dictature du vote, mais une démocratie de la discussion, du consensus réel où on accepte d'être convaincu et de se laisser convaincre. Une démocratie où le vote est dépassé, simple relent de la démocratie libérale et bourgeoise qui veut opposer et diviser les gens plutôt que de chercher l'élaboration collective d'un projet politiques, d'actions et de transformation réel du quotidien. L'élèment central est la taille modérée des cellules qui permt l'expression de tous. Ceux que l'on n'entend pas lors des assemblées générales, qui n'osent pas s'exprimer par sentiment d'incompétence politique, complexe d'infériorité vis à vis de cadres plus à l'aise à l'oral, sont beaucoup plus anclins à le faire dans des espaces réduits et conviviaux. Par ce processus, chaque camarade peut ainsi prendre confiance en lui, et développer aussi bien sa compréhension des enjeux politiques que ses compétences opérationnelles, par le partage des tâches.

 

Comment faire ?

La rigueur est la première prémisse de la mise en place d'une cellule. Elle se traduit à la fois par une régularité de l'organisation (réunions régulières, activités institutionnalisées) : c'est ce qui transforme une initiative (reposant sur peu de camarades potentiellement extérieurs) en dynamique qui s'auto-entretient et s'auto-légitime. Cette rigueur se traduit également par une exhaustivité dans la gestion des camarades, des sympathisants et des contacts. Les mails, les téléphones, les envies militantes sont centralisés sur des tableurs et des cahiers militants, afin que personne ne soit, de manière non intentionnelle, mis sur le carreau par manque d'organisation. L'adaptabilité est également une conséquence de la rigueur : on ne demande pas la même chose à un contact qu'à un militant chevronné, mais chacun peut et doit participer à des tâches de conception et de réalisation d'une action militante. La démocratie bourgeoise se caractérise par une déconnexion entre ceux qui décident (par délégation de pouvoir, élection …) et ceux qui exécutent ces décisions. A l'inverse, la démocratie populaire se caractérise par une absence de déconnexion entre la décision et l'exécution des tâches. C'est en appliquant ceci que nous pourront appliquer en interne le slogan de 2012 « prenez le pouvoir ». Ceci ne veut pas dire que tout le monde fait tout (la division du travail est gage d'efficacité), mais que ceux qui exécutent doivent décider, que ceux qui décident doivent mettre en pratique, et que le partage des tâches, notamment de conception, peut progresser. Pour que ceci soit efficient, il faut tout de même que chaque personne qui fait une tâche qu'il n'a encore jamais fait soit accompagné, conseillé, tout en restant maître de son initiative. C'est un processus d'autonomisation politique permanent.

 

 

La cellule n'est donc pas une solution en soi, mais un outil au service d'un redéploiement du PCF. L'ouverture et l'investissement citoyen est souvent au cœur des débats sur la transformation du Parti. Si nous concentrons nos efforts pour créer des collectifs, des fronts … Le renforcement du PCF est déterminé par des éléments contextuels, c'est à dire externe à nos actions. Si nous concentrons nos efforts sur le redéploiement et le renforcement direct du Parti, le contexte pèse moins, et nous permet de déterminer démocratiquement notre conduite stratégique, d'autant plus forts dans le rapport de force interne à la gauche.

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