Les congrès du PCF

Les congrès du PCF
Accueil
 
 
 
 

Union Européenne : Sortir de l’impasse - David Bour - 67

“ Du point de vue des conditions économiques de l'impérialisme, c'est à dire de l'exportation des capitaux et du partage du monde par les puissances coloniales « avancées » et « civilisées », les États-Unis d'Europe sont, en régime capitaliste, ou bien impossibles, ou bien réactionnaires. ” Lénine, A propos du mot d'ordre des ÉtatsUnis d'Europe (août 1915)

Union Européenne : Sortir de l’impasse
L’année écoulée aura été riche en enseignements dans notre analyse de l’Union Européenne et sur la stratégie à adopter à son égard. En effet: de janvier à juillet 2015 s’est déroulé en Grèce un scénario qui attend la France si notre force venait à arriver au pouvoir. S’y mêlent les questions monétaires, économiques, sociales, politiques et la stratégie à mettre en place face à une institution qui nous est hostile de par sa nature de classe.
Les similitudes entre l’analyse de Syriza avant son arrivée au pouvoir et la notre sont indéniables, et notre soutien à Alexis Tsipras ne vient pas de nulle part. Nous n’avons pas à le regretter, mais nous devons tirer les leçons de ce qui est à qualifier d’échec, malgré les circonstances atténuantes.

L’échec de Syriza
“ Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens. ” Jean Claude JUNCKER, président de la Commission européenne.
L’arrivée au pouvoir de Syriza en janvier 2015 a suscité une vague d’espoir immense en Europe. Enfin, notre gauche, progressiste, populaire, radicale et antiaustérité, arrivait au pouvoir et allait faire ses preuves. Alexis Tsipras allait tenir tête à la commission européenne et prouver qu’un autre avenir que l’austérité à
perpétuité pouvait exister pour les peuples des pays membres de l’UE. Il est indéniable que Tsipras a mené une lutte acharnée face à des adversaires prêts à tout pour le mettre en échec et complètement sourds à des revendications de bon sens, alors que les Grecs ont été saignés par des années de purges   austéritaires.
Des politiques économiques imposées par la Troïka qui ont aggravé les inégalités, cassé le niveau de vie des Grecs, sans régler la question de la dette. Les mêmes mesures que celles préconisées pour la France, mais dans un pays qui pèse 2% du PIB Européen quand notre pays représente 18%. Nous ne reviendrons pas sur la meute acharnée des politiciens et des médias qui ont sali et dénigré Syriza en 2015. De Macron les comparant au FN aux journaux allemands qualifiant les Grecs de feignants, les insultes sont allées de paire avec les mensonges. Sans parler de l’assèchement par la Banque Centrale Européenne des finances grecques. La suite, nous la connaissons. Après un référendum sur l’accord proposé par la commission européenne au gouvernement Tsipras rejeté par les Grecs, celui-ci signe un mémorandum pire que les précédents et dont les quelques marges de manoeuvre n’enlèvent rien à l’essentiel, c’est à dire la continuité de l’austérité qui se traduit aujourd’hui par une réforme des retraites que nous aurions rejeté si elle avait
été proposée chez nous par François Hollande. S’il est indéniable que Tsipras continue de jouir d’une popularité certaine en Grèce, nous devons analyser et comprendre son échec, afin de faire évoluer nos propres positions et éviter de se retrouver un jour dans la même situation que Tsipras en juillet 2015.
De la volonté de faire un exemple

En tant que marxistes, nous le savons: la force de la politique est une belle chose mais il ne s’agit que de littérature. La réalité, ce sont les rapports de force. Alexis Tsipas a payé plusieurs éléments en sa défaveur: une situation budgétaire catastrophique, le verrouillage imposé par les traités européens pour obtenir des
financements, un poids faible au sein de l’Union Européenne et une volonté de le mettre en échec afin d’en faire exemple pour tout mouvement souhaitant s’opposer aux dogmes libéraux et austéritaires de ceux qui détiennent le pouvoir dans l’UE. Mais il a aussi payé une erreur qui est à mettre son actif : ne pas avoir prévu de plan en cas d’échec des négociations. Une situation qui était pourtant prévisible. Et c’est là que commence le parallèle à faire entre ce qui s’est passé en Grèce et ce qui nous arrivera quand nous serons au pouvoir.
Créer le rapport de force: dans quel but ?
Comme dit plus haut, la France représente 18% du PIB Européen. Elle est le deuxième pays de l’Union en nombre d’habitants et devrait devenir le pays le plus peuplé d’Europe d’ici quelques décennies. Sa force économique pourrait en faire une force politique. Mais au lieu de ça, les politiques économiques  européennes sont calquées sur celles de l’Allemagne, seul pays à trouver son compte dans des politiques d’équilibre budgétaire. Retraite par capitalisation, fédéralisme, population vieillissante, modèle économique libéral: les spécificités de l’Allemagne sont bien plus nombreuses et complexes que le “modèle allemand” que nous vendent main dans la main les médias et la droite. Un modèle totalement différent de celui de la
France, de son Etatprovidence, de sa Sécurité Sociale, de son droit du travail avancé, de sa retraite par répartition. Différent au point d’être incompatible. Et pourtant, les gouvernements successifs acceptent sans broncher toutes les injonctions de la Commission Européenne, mises en application pour plaire aux
gouvernements en place à Berlin. Ce n’est pas un hasard si au coeur de la crise Grecque nombreux se sont focalisés sur les affrontements Tsipras/Merkel et Varoufakis/Schaubble.
Partant de ce constat, il est nécessaire de s'interroger sur ce qui permet d’engager un rapport de force: le poids économique et politique de notre pays mais aussi la nature des revendications et le seuil minimal en dessous duquel nous ne pouvons accepter un accord.
Et c’est là que le bat blesse: alors que l’UE est prête à un certain nombre de compromis à l’égard de David Cameron, dont les revendications sont inspirées de celles de la City et absolument pas par l’urgence sociale, pour que le Royaume-Uni reste en son sein, qu’en serait-il s’il s’agissait d’un gouvernement de gauche, auquel participeraient des Communistes, en France ? Peut-on sérieusement imaginer les commissaires européens, le monde de la finance, les bourgeoisies des différents pays Européens, accepter cet état de fait sans broncher ?
La souveraineté populaire et le respect de nos engagements : des impératifs non négociables Il est temps de confronter notre projet à la réalité: le principal obstacle à l’Europe sociale, à l’Europe des peuples et de la coopération, peut être l’Union Européenne ellemême.
Cette structure supranationale, machine à broyer les conquêtes sociales et les souverainetés populaires, dont nous avons combattu la construction depuis ses débuts, peut être par son intransigeance, son  dogmatisme et les intérêts qu’elle défend, sa propre fossoyeuse.
Devons- nous renoncer à notre programme pour le maintien de l’Union Européenne ? Cette question, nous ne devons pas, comme Alexis Tsipras, attendre d’avoir le revolver sur la tempe pour y répondre. Il en va de notre cohérence, de notre clarté et de l’espoir que nous pouvons susciter. Nous ne pouvons bercer d’illusions les travailleurs Français. Notre mot d’ordre face à l’Union Européenne doit être clair, franc, sans concession: La confrontation, pas la compromission; la souveraineté populaire ou la sortie. Nous devons accepter l’idée que pour construire l’Europe des peuples et de la coopération, nous devrons peut être nous passer de l’Union Européenne du capital. S’il ne doit pas forcément s’agir de notre première option et
si cela ne peut constituer notre seule solution, nous devons néanmoins intégrer cette possibilité à notre programme d’actions.
Voici ce que disait en 2012 le programme du Front de Gauche “L’Humain d’abord” : Agir tout de suite
¦ Remise en cause du Pacte pour l’Euro+ et création d’un Fonds de développement social, écologique et solidaire européen

Agir pour un changement durable
¦ Bataille politique et diplomatique pour un nouveau traité européen
¦ Refonte des statuts et missions de la BCE
“ Nous avons besoin d’une Europe laïque, indépendante, de paix et de solidarité internationale. Une Europe qui agisse pour mettre fin aux ingérences impérialistes et néocolonialistes. (...) La France prendra l’initiative d’États généraux de la refondation européenne en faisant appel à toutes les forces politiques et sociales disponibles en Europe.(...) La Banque centrale européenne La BCE est aujourd’hui un obstacle à la sortie de crise, dans la mesure où elle encourage systématiquement les marchés financiers, l’austérité, la lutte contre l’inflation au détriment de l’emploi et des salaires. Son objectif unique fixé par les traités est de « maintenir la stabilité des prix », c’est à dire en l’espèce la valeur des capitaux amassés par les rentiers.” Cette analyse et ces propositions sont, hélas, toujours valables 4 ans après. La situation économique, politique et sociale au sein de l’UE a renforcé la contradiction existante entre les aspirations des peuples Européens et les desseins de ses dirigeants. La crise Grecque a confirmé le dogmatisme et l’autoritarisme de l’UE. La crise des réfugiés a démontré son incapacité à mettre en place des solutions d’urgence face à des situations dramatiques. Le conflit en Ukraine a mis à mal le mythe de “L’Europe de la paix” avec une guerre civile à nos frontières.

Oui, il y a urgence à ce que change cette Union qui va à l’encontre de ce pour quoi nous nous battons. Si le peuple de France nous porte aux responsabilités, nous lui devons d’être clair sur notre action à venir. Nous devons rompre avec les traités présents. Nous devons porter la proposition d'une refondation sur d'autres bases en soumettant cette démarche à nos engagements de manière impérative. C'est à ce stade que la sortie de l'UE ne doit pas être un tabou. Elle doit être envisagée, préparée, portée par des mesures alternatives concrètes et intégrée au rapport de force que nous voulons impulser. Car c’est de ce dernier que dépendra la possibilité d'un partenariat entre les peuples d'Europe sur de nouvelles bases, ou une sortie de
l'UE dans l’objectif d’une construction alternative.

Il y a actuellement 0 réactions

Vous devez vous identifier ou créer un compte pour écrire des commentaires.