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Comment rendre utile l'idéal communiste ? Yvon Huet - 75

Comment rendre utile l’idéal communiste ?

L’avantage d’avoir vécu plusieurs périodes de notre organisation communiste ne me donne pas le droit de cuissage intellectuel certes, mais c’est un atout que je mets à la disposition de mes camarades français et citoyens du monde pour mieux appréhender l’avenir avec confiance.

 

Savoir prendre son temps, c’est ne pas le perdre

Pour ne pas se prendre les pieds dans le filet, JE pense que NOUS devons plus que jamais prendre le temps de réfléchir. Oui, prendre le temps, quand le système dans lequel nous vivons nous fait croire que nous ratons toujours quelque chose à ne pas vouloir aller plus vite.

 

L’état des lieux d’un capitalisme en crise tend, de plus, à créer des rapports anxiogènes dans toute la société et les communistes n’échappent pas à la règle. La peur de s’isoler chez les uns et la peur d’être trahi des autres créent un climat propice à toutes les scissions, qui sont le propre du fonctionnement social démocrate quand elles sont virtuelles, gauchiste quand elles sont physiques. Si nous voulons avancer vraiment, il faut éviter ce piège mortifère.

 

Les fondamentaux, c’est l’humanité elle-même

Beaucoup de jeunes camarades disent : « il faut revenir aux fondamentaux ». Ce besoin recouvre un questionnement. Nous nous référons trop à la simple histoire de ce 20e siècle turbulent qui a vécu le meilleur et le pire et, surtout, un bond en avant technologique que nous n’avons pas eu le temps de digérer, dans le passage de la lampe à l’huile au voyage sur la Lune.

 

Pour faire simple, nous sommes les enfants de La Fontaine qui fut, lui aussi enfant d’Œsope. Nous sommes aussi les enfants de Bach lui-même enfant de Guillaume de Machaut et de tant d’autres. Quelles que soient les formes nouvelles d’expression et des révolutions culturelles qui ont marqué notre société, elles vivent sur le même terreau.

 

Et ce terreau s’est enrichi d’influences dites « extérieures » qui elles-mêmes nourrissent une civilisation humaine à la fois diversifiée et mélangée. Sans vouloir en rajouter à cette courte démonstration, la fascination que nous avons à admirer les esquisses de nos ancêtres dits « préhistoriques » des grottes de Pech Merle prouve que l’humanité actuelle n’est que le résultat d’une très lente progression mentale qui n’a pu avancer que par la transmission, le voyage et l’échange et a toujours régressé quand elle s’est repliée sur elle-même quelle que soit l’avancée des technologies existantes. Alors que nous dissertons pour essayer de maîtriser cette révolution numérique qui change nos comportements, nous n’avons pas, en fait, changé de références. Nous répétons et enrichissons ce que nous avons appris et qui fait le rythme de notre destinée collective. En même temps, nous mettons toute notre énergie à chercher de nouveaux horizons, encadrés par deux tendances, le besoin de pérennisation par le perfectionnement de notre univers d’un côté et le besoin d’aller chercher toujours plus loin pour découvrir le secret de nos origines, sachant que les deux se tiennent. Le communisme est une des réponses philosophiques à ce processus de recherche permanent qui caractérise le genre humain.

 

Le communisme, modèle ou mouvement ?

Les formes d’expression communistes du 20e siècle ont été majoritairement influencées par la théorie la société « parfaite » qu’il faudrait atteindre pour éteindre le feu de la lutte de classe. Grossière erreur et caricature annoncée. L’échec de l’Union Soviétique est bien la preuve que cette théorie a trouvé ses limites et que nous payons aujourd’hui le prix fort d’une démarche qui, sur le fond, n’a pas tiré tous les enseignements de la pensée de Marx et Engels. Le capitalisme a pris sa revanche et nous devons assimiler ces limites d’une pensée modéliste pour non pas faire « mieux », mais autrement.

 

Est-ce à dire qu’il faut tirer à boulet rouge sur la pensée de Lénine qui fut ensevelie très rapidement sous la montagne stalinienne. Certainement pas. Pourquoi dénigrer des militants qui ont aidé leur peuple à sortir des chaînes du féodalisme en 1917, au même titre que les révolutionnaires français de 1789, au même titre que les communards de 1871. Nous devons prendre cette période, au contraire, comme une aubaine, parce qu’elle nous permet mesurer l’effort que nous devons faire pour aider l’humanité à remettre en cause le capitalisme, tel qu’il est aujourd’hui, dans une perspective clairement humaniste et universaliste.

 

Dans ce sens, nous devons commémorer comme il se doit la Révolution d’Octobre qui permit à des millions de Russes et peuples de l’Est asiatique de sortir de la misère, de l’analphabétisme et de l’obscurantisme, au prix de terribles sacrifices, dont celui, plus tard, d’aider le monde à se débarrasser du nazisme. Rien que pour cela, nous devons défendre notre histoire qui n’est ni blanche ni noire, encore moins grise. Elle correspond à une période incontournable de l’histoire de l’humanité qui n’est pas une leçon de catéchisme.

 

Nous devons aussi mieux comprendre que cette société, comme d’autres, et surtout la nôtre, a vécu une contre révolution, avec cette caractéristique qu’elle s’est dite toujours « communiste » alors qu’elle en a abandonné les principes fondamentaux pour aboutir au fiasco que l’on a connu. Sans vouloir faire de rapprochement hâtif mais pour faire un peu d’humour, c’est comme si on disait aujourd’hui que François Hollande et son équipe construisaient le socialisme.

 

Liberté, Égalité, Fraternité

 

Les communistes sont aujourd’hui destinés non pas à survivre en regardant leur passé avec perplexité mais à créer les conditions du rêve de leurs anciens, ce qui n’exclut pas les leurs. Cela s’inscrit dans les principes mêmes la Révolution française et bien au-delà : Liberté, Egalité, Fraternité. Il suffit de donner un sens à ces trois mots pour que le capitalisme soit naturellement remis en cause dans le niveau de crise qu’il vit aujourd’hui. Notre combat sur ces trois thèmes oblige à initier une pratique politique qui ne s’enferme pas dans des systèmes d’alliances « miraculeuses » qui finissent toujours mal. Ce fut le cas du programme commun de gouvernement. C’est le cas actuellement avec le Front de Gauche qui, certes, a permis un certain réveil de nos valeurs, mais a trouvé vite ses limites dans une confusion qui n’a donné confiance à personne, comme l’a prouvé le résultat des élections législatives qui ont suivi la présidentielle et qui n’ont jamais été inversés, sauf peut-être à ceux qui pensent qu’il faudrait se trouver un nouveau chef, surtout pas communiste, pour terrasser l’adversaire de classe. La dérive jacobine et bonapartiste finit toujours à Waterloo, qu’on se le dise.

 

Construire l’alternative en semant la lutte

Les communistes doivent trouver en eux-mêmes les motifs de leurs motivations avec un objectif, être des semeurs de luttes partout où ils le peuvent et à quel que niveau que ce soit. Il n’y a pas de terrain privilégié de la lutte de classe. De Goodyear et des Fralib à l’université en passant par les territoires, particulièrement les populaires, mais pas que, chaque communiste doit être un empêcheur de tourner en rond pour la classe dominante et ses joyeux serviteurs. Qu’il soit vieux ou jeune, en vadrouille ou au chaud dans son quartier, il a en plus le moyen de communiquer ses valeurs et il ne faut pas qu’il se prive. Et cette lutte doit être accompagnée d’une incitation forte à la responsabilisation individuelle et collective.

 

La démocratie, fer de lance d’une vraie révolution

Notre pays a vécu soixante ans de pouvoir personnel avec un système politique qui a aussi dévoyé le rôle des élus de la République, cantonnés essentiellement à suivre les injonctions d’un exécutif caporaliste. Les communistes ne sont pas en dehors de la société. Ils ont subi la pression de cet état des lieux. Ils ont épuisé toutes les possibilités de se faire entendre et se sont parfois fait des illusions en croyant que c’est en envoyant des ministres communistes au gouvernement, malgré un rapport de force très défavorables, qu’ils pouvaient essayer de changer le cours des choses. C’est le contraire qui s’est passé. Le Front National a continué de progresser et le PCF de chuter.

 

Est-ce à dire que nos élus et ministres n’ont pas fait leur travail. Si, dans l’ensemble, ils ont été bons, voire très bons, même si on peut s’interroger sur le rôle qu’a joué Jean-Claude Gayssot face aux privatisations imposées par Jospin. Mais encore une fois, vu le rapport de force, pouvait-il faire autrement ? Il faut savoir reconnaître honnêtement les limites d’une démarche politique qui consiste à sauver les meubles en se retrouvant mêlé malgré soi au jugement négatif d’un peuple qui perd ses repères et s’engouffre dans le repli.

 

Parler de cette période, comme on peut discuter de notre stratégie actuelle doit permettre de s’affranchir d’un passé récent sans tomber dans des règlements de compte. Quand on parle de transparence, celle-ci est tout aussi importante que les autres. Chaque génération fait son expérience, trouve la limite de ses prérogatives et lègue au futur une mine de renseignements utiles pour continuer l’histoire du communisme, pour ce qu’il est en France, mais aussi dans le monde.

 

Aujourd’hui, c’est en luttant pour la démocratisation de notre société et en faisant des citoyens les acteurs véritables de ce processus que les chances d’un vrai changement seront possibles. Les expériences des pays arables, de l’Espagne et de la Grèce, pour ne citer que ces cas là, prouvent que la lutte pour la démocratie est le fer de lance de toutes les révolutions, même si elles échouent ponctuellement, comme en Egypte. L’acharnement des forces du capitalisme à durcir les régimes politiques, à soutenir les oligarchies, prouve que nous avons raison de pousser le bouchon le plus loin possible. La multiplication des foyers de guerre autant que les reculs sociaux qui sont opérés sur l’ensemble de la planète doit nous conforter dans notre stratégie de conquête de l’initiative populaire et démocratique. Alors comment s’y prendre ?

 

Renforcer le PCF et son expression, une priorité

La réponse se construit tous les jours. Et elle se construira d’autant plus facilement que nous saurons renforcer ce parti encore trop faible aujourd’hui pour faire face à ses responsabilités historiques. Et la démocratie que nous recherchons dans le parti lui-même n’est pas une religion mais un processus qui doit toujours s’améliorer. Combien de camarades votent quand des décisions importantes doivent être prises ? Même pas la moitié. Combien participent activement à la vie de l’organisation. Trop peu.

 

Au point où nous en sommes, tout est possible pour que les communistes reprennent confiance en eux. Encore faut-il qu’ils n’aient pas peur de leur étiquette politique, notamment comme ce fut le cas récemment dans la région Ile de France où la majorité des élus communistes a imposé l’étiquette « Front de Gauche » qui se réfère à une image qui ne fait pas spécialement recette et dédouane les élus communistes de leurs responsabilités vis à vis de leur parti. Les militants n’ont pas été consultés sur ce sujet qui pourrait paraître anodin. Je l’exprime sans méchanceté mais avec insistance : ce n’est pas en se cachant derrière le pilier d’une alliance qu’on évite le danger.

 

Au contraire, on n’est jamais tant poussé à travailler avec les autres que lorsqu’on est bien dans sa peau de communiste, libre de ses mouvements et clairement identifié par les citoyens électeurs. Ce qui est vrai avec les forces du Front de Gauche l’est tout autant avec les « frondeurs » du PS ou qui que ce soit avec lequel nous travaillons pour le bien commun.

 

Reconstruire le monde du travail solidaire

Le PCF sera ce que les nouvelles générations sauront en faire ou non avec, en appui, ceux qui, comme moi, ont vécu les rêves de 68 et la dure réalité des liquidations industrielles et paysannes qui ont suivi et ont abouti à ce que nous vivons maintenant sans que nous ayons pu l’empêcher même si nous pouvons être fiers d’avoir pu freiner les appétits des patrons voyous partout où c’était possible.

 

Du boulot pour aider à rebâtir tout cela, il y en a à la pelle, dans une France qu’il faut fermer au capital prédateur et ouvrir à celui monde du travail solidaire, tout simplement, sachant qu’il faut toujours savoir harmoniser les conquêtes du passé et les idées nouvelles issues du mouvement de la société, en redonnant sa noblesse au mot socialisme qui a été bien malmené comme le mot communisme. La lutte de classe a de beaux jours devant elle. Les prédateurs le savent, c’est bien pourquoi ils mettent le paquet pour dresser un écran de fumée aussi intense, empêchant ainsi que les choses ne bougent dans notre pays. Une raison de plus pour travailler ensemble pour le percer, cet écran médiatique qui maintient la majorité de nos concitoyens dans le repli.

 

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