Les congrès du PCF

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Regagner la bataille du rail pour un service public ferroviaire du 21è siècle. Thomas Portes - 47

 

La crise de 2007 a confirmé une chose, le système capitaliste est au bord de l’implosion. Après près de 30 ans de politiques néolibérales, les besoins sociaux des populations sont immenses. Au 1er rang desquels se trouvent les services publics. Notamment en matière de transport.

Depuis plusieurs années, le service public ferroviaire, voyageurs comme marchandises, est la cible d’attaques conjuguées. Attaques issues à la fois du gouvernement, de la direction de la SNCF et de l’union européenne.

Depuis 20 ans l’Europe , qui construit sa législation sur la doctrine libérale, mène une guerre à mort contre le service public ferroviaire, les 4 paquets ferroviaires votés depuis 2000 à Bruxelles en sont la parfaite illustration.

En effet, depuis 2011 et l’adoption du 4ème paquet ferroviaire (pour rappel, celui-ci est un ensemble de règlements et de directives qui a pour objectif la libéralisation totale des transports de voyageurs par rail en Europe. Il prévoit aussi de séparer les infrastructures du transporteur en éclatant les entreprises historiques intégrées, au nom de l’égalité d’accès de tous les opérateurs de transport), l’union européenne n’a eu de cesse de prôner l’ouverture à la concurrence comme solution d’avenir.

Dès 2001, et le premier paquet ferroviaire, l’Europe avalise la séparation entre le gestionnaire de l’infrastructure et les différentes entreprises ferroviaires. Elle impose, en outre, la séparation au moins comptable des activités de transport de voyageurs et de marchandises.

En 2004, lors de l’adoption du second paquet ferroviaire, on assiste à la création d’une agence ferroviaire européenne, véritable rouage de la politique de libéralisation. Ce paquet entérine également la libéralisation totale du fret ferroviaire, j’y reviendrais tout à l’heure.

2007 marque une nouvelle étape dans la casse du rail. Avec ce troisième paquet ferroviaire l’Union Européenne acte l'ouverture à la concurrence du marché voyageur ferroviaire international.

Enfin le 4ème paquet ferroviaire finit le travaille de sape en autorisant l’ouverture à la concurrence des lignes ferroviaires nationales pour 2020. Pour les régions cela est repoussé à 2026. Mais le plus grave est fait, la brèche est ouverte.

Anticipant avec un empressement maladif les directives européennes, le gouvernement est un acteur central de la casse du ferroviaire public.

Inaugurées dans les années 1830 pour répondre à des besoins économiques, les voies de chemins de fer (qui vont connaitre un essor rapide en raison des possibilités nouvelles offertes aux industries), vont très rapidement intéresser l’état. Pourtant, déjà, l’idée même d’associer la notion de service public au chemin de fer n’est pas d’actualité.

En revanche, l’état va se rendre compte d’une chose. Sur un réseau de 55 000 kilomètres de voies, seulement une partie est exploitée par les compagnies privées. Il s’agit évidemment de la partie la plus rentable.

Face à cette problématique, les pouvoirs publics vont pousser à la création d’un réseau d’intérêt général. Sur le plan économique, le financement est réalisé sur le modèle des partenariats publics privés actuels.

Au même moment une forte revendication sociale monte : celle de la nationalisation des chemins de fer français. C’est en 1937, sous le front populaire, que cette démarche revendicative va prendre corps avec la création de la SNCF.

Pourtant déjà en 1937, Pierre Semard, leader syndical CGT cheminot reste modéré dans ses propos : « Nous n'avons pas d'illusions sur la création de la SNCF, la nationalisation reste à faire (...). la SNCF doit être considérée comme une étape dans cette voie et sa faillite serait un échec ».

En 1982, avec le retour de la gauche au pouvoir, et la mise en place de la loi LOTI, on, assiste à un nouveau pas en avant dans la notion de service public. Cette loi qui modifie le statut de la SNCF de société anonyme à établissement public industriel et commercial à pour objectif de permettre le transport « dans des conditions raisonnables d’accès, de qualité et de prix ainsi que de coûts pour la collectivité ».

L’embellie sera de courte durée. Enfermé dans une logique d’équilibre des comptes imposée par sa tutelle politique, l’Etat, la SNCF va évoluer. Malheureusement pas dans le bon sens. Baisse des activités, développement du modèle à grande vitesse au profit du ferroviaire de proximité et recours massif à l’endettement sont trois caractéristiques majeurs de cette nouvelle politique.

En 1997, dès son arrivé au pouvoir, Nicolas Sarkozy a pris pour cible les cheminots et le rail français. Il fait dans un premier temps passer une loi qui restreint le droit de grève dans les transports terrestre et entend dans la foulée s’attaquer au régime spécial de retraire des cheminots. Sur ce dossier, grâce à une forte mobilisation, il essuiera un échec cuisant. Cet échec marquera l’élaboration d’une nouvelle feuille de route pour la SNCF et la nomination d’un nouveau dirigeant : Guillaume Pépy.

La mission que lui confie Sarkozy est claire : liquider le ferroviaire public pour en faire un groupe privé d’envergure mondiale. Avec un directeur dont le modèle est Michel Bon, l’homme qui a privatisé France Télécom, la casse du rail est en route. Les méthodes managériales issues du privé pleuvent sur les cheminots. Individualisme, délation, prime aux objectifs, embauche hors statut … le grand fossoyeur se met au travail. En 5 ans, pas moins de 12 000 emplois seront supprimés. Inévitablement, la qualité de services rendus aux usagers se fait ressentir.

En 2011, le sénateur Grignon, sur demande du gouvernement, publie un rapport sur l’ouverture à la concurrence des transports régionaux. Là encore, devant la forte mobilisation des usagers et des cheminots, le ministre des transports se voit obligé de convoquer des assises du ferroviaire. Encore une fois les débats sont biaisés. Ces assises tenues en l’absence de cheminots et d’usagers sont confiées à des experts libéraux. Toutes les alternatives portées par la CGT resteront aux oubliettes.

En mai 2012, avec la victoire de François Hollande, et le retour de la gauche au pouvoir, on se prend à rêver d’une autre politique en matière de transport, notamment de ferroviaire public. Très rapidement les espoirs vont être douchés.

Loi Macron, rapport Duron, réforme ferroviaire… Le quinquennat de François Hollande est une véritable mise à mort du service public ferroviaire.

C’est donc dans ce contexte que se tiendra le congrès du Parti communiste au moins de juin prochain. La question ferroviaire, que nous avons intitulé pendant les régionales « la bataille du rail » doit occuper une place centrale de le combat politique et social que mènent les communistes pour un autre projet de société.

Deux axes de combat doivent être engagés. Le premier, relatif au transport de marchandises, le second concerne le transport de voyageur.

«Fret ferroviaire, il y a urgence ».

Le Fret ferroviaire résume à lui seul l’échec de la stratégie de la SNCF. Pendant de nombreuses années, l’argument selon lequel « il faut anticiper l’ouverture à la concurrence pour que les opérateurs puissent adapter leurs méthodes de productions et leur organisation » à été édicté en vérité inébranlable. Quand on analyse la situation du fret ferroviaire public aujourd’hui, on s’aperçoit du désastre. L’ouverture à la concurrence n’a rien réglé, pire elle a contribué à la destruction quasi-totale du fret sur le réseau national. De 2000 à 2009, le transport ferroviaire de marchandises n’a cessé de régresser, passant de 58 à 33 milliards de tonnes/kilomètre. La part modale du fret ferroviaire a reculé de 22 % en 2000 à 14 % en 2009. Avec un déficit de plus de 900 M€ pour un chiffre d’affaires de près de 1 300 M€, Fret SNCF a enregistré les plus mauvais résultats de son histoire. Aujourd’hui, le fret ferroviaire Français occupe la dernière place au niveau européen ! Cela ne peut plus durer !

Le Parti communiste qui porte depuis des années l’idée d’une politique novatrice en matière de transition écologique, et de lutte contre le réchauffement climatique, doit continuer de porter avec force l’idée que la relance du fret ferroviaire est possible. Il est seulement question de volonté politique.

Seulement aujourd’hui il faut mettre en place des investissements massifs pour remettre en état les nombreux triages laissés à l’abandon depuis des années, et de façon volontaire, par la SNCF et l’Etat. Comment financer ces investissements ? Il faut établir une taxe carbone qui permette d’alimenter un fond national d’investissement à destination exclusive du fret. Alors quel a France se targue d’être en pointe dans la lutte contre le réchauffement climatique, et vient d‘accueillir la COP21 (qu’elle présente comme un moment historique), il faut mettre fin au modèle du tout routier. Les enjeux écologiques mais aussi sécuritaires sont énormes !

De la même manière, il faut contribuer à assurer les cohérences territoriales. Ainsi, l’intervention publique doit inciter les chargeurs et les industriels à réfléchir en commun à leurs transports. Des convergences peuvent se développer entre l’intérêt général (qui vise à orienter les flux vers des modes respectueux de l’environnement) et l’intérêt des chargeurs qui peuvent bénéficier de ces mises en commun. Se pose ici la question des plateformes multimodales et de la complémentarité entre les différents modes de transports. Plutôt que de sans cesse les opposer entre eux, notamment par le jeu du dumping social, nous devons travailler à la convergence des moyens de transports. Les ports, souvent marginalisés par le transport ferroviaire de marchandises représentent un enjeu important de demain. Dans chaque port français (Bayonne, La rochelle, Marseille…) les communistes, en travaillant avec les acteurs locaux doivent porter des propositions et mener le combat pour le développement de ces plateformes de proximité. Ainsi nous pourrons amener les marchandises en train au plus près des infrastructures portuaires, et ainsi limiter les transports routiers. Bien des solutions existent, il faut maintenant les faire émerger, et surtout, faire en sorte que les citoyens s’en emparent.

« Transport de voyageurs, des usagers pas des clients ! »

Fermeture des guichets, de gares, suppression de trains, fermetures de lignes … Sous la double lame des politiques nationales de casse des services publics et des directives de l’Union européenne, le service voyageur n’est pas épargné. Pas une semaine ne passe sans que l’on annonce une fermeture de ligne ! La situation actuelle résulte d’une politique de long terme menée conjointement par la SNCF et l’ETAT. Abandon des politiques de modernisation des infrastructures, réduction des investissements, hausse des budgets alloués à la route au profit du rail, désengagement financier et tentative de transfert aux régions) : autant de décisions lourdes de conséquences qui remettent en cause la pérennité même d’un service public ferroviaire de qualité.

Là encore l’ouverture à la concurrence est présentée comme la solution miracle pour l’avenir du ferroviaire. Les communistes doivent continuer de porter l’idée selon laquelle la libéralisation n’est pas la solution. A l’heure où les politiques d’austérité ne cessent d’accentuer les inégalités entre les citoyens, les services publics demeurent un rempart contre ces inégalités. Ce n’est pas de libéralisation dont les gens ont besoin mais de services publics de qualité.

La question des TET résume à elle seule la politique dogmatique mise en œuvre par la direction de la SNCF. Dès 2005, la SNCF avait tenté d’opérer un transfert de compétence d’une grande partie de ces circulations sur les régions. La mobilisation des usagers et des cheminots associée à la colère de nombreux élus avait permis un retrait de ce funeste projet.

Aujourd’hui, profitant du prétexte de l’austérité, donc objectif de réduction des dépenses publiques, le gouvernement socialiste comme la direction SNCF tente à nouveau de remettre en cause les TET.

Depuis plusieurs années, celle-ci a tout fait pour que le service se dégrade, préparant ainsi le terrain à ses filiales privées.

Cette direction d’un coté s’inquiète des comptes des trains intercités et dans un même temps se permet d’injecter 50 millions d’euros dans sa filiale de bus (ID BUS). La SNCF supprime les trains d’équilibre du territoire mais acquiert 80 nouveaux bus. Curieuse stratégie commercial pour une entreprise de transport public ferroviaire.

Les trains interrégionaux relèvent de l’intérêt national. Ce sont des liaisons ferroviaires nationales d’aménagement du territoire, véritables épines dorsales qui irriguent les territoires. La Liaison Quimper-Toulouse permet par exemple de desservir pas moins de trois ports, trois universités et trois métropoles.

Au nom d’idéaux libéraux qui placent les questions de rentabilité au-dessus de la notion de service public comme d’intérêt général, la suppression des trains intercités (et de nuit) comme la libéralisation du transport de voyageurs par autocars aura de graves conséquences pour l’ensemble des usagers, des cheminots mais également pour l’ensemble des citoyens.

Par la remise en cause des TET, on remet en cause l’égalité de tous les citoyens dans l’accès au transport ferroviaire. On remet également en cause l’unité territoriale nationale.

Il n’est pas acceptable qu’au nom d’un fanatisme libéral, gouvernement et direction SNCF organisent la mise ne place de désert ferroviaire. Cette politique de casse du service public va à l’encontre même du principe républicain qui garantit une « République indivisible ». Le service public ferroviaire doit continuer à être un outil indispensable du maillage territorial par le maintien ou la création de lignes transversales permettant une meilleure accessibilité pour chacun.

Pour toutes ces raisons, le moment est venu d’engager un front commun pour le service public, pour l’aménagement du territoire, pour la sauvegarde de l’environnement. Seule une riposte d’ampleur permettra de faire plier les tenants d’un libéralisme toujours plus dangereux pour le système ferroviaire public que nous défendons. Refusons de combler les désidératas des actionnaires et comblons les souhaits des usagers comme des cheminots.

Lutter pour un service public ferroviaire c’est lutter pour défendre un maillage territorial qui répond non pas à des intérêts financiers mais à des intérêts humains. Lutter pour un service public ferroviaire c’est lutter pour un mode de transport où la notion de sécurité prime sur celle de rentabilité. Lutter pour un service public ferroviaire c’est œuvre en faveur de la transition écologique. Enfin lutter pour un service public ferroviaire c’est lutter contre les discriminations sociales, économiques et territoriales.

Dans l’intérêt des usagers du rail, des cheminots mais également dans celui de l’ensemble des citoyens, il est urgent de se mobiliser pour le maintien et le développement du service public ferroviaire voyageur et marchandise, dans tous les aspects qu’il représente, au cœur de nos territoires.

Partout en Europe, les pays ayant fait le choix d’anticiper l’ouverture à la concurrence en subissent les conséquences. Même la très libérale et « Thatchérienne» Angleterre réfléchit aujourd’hui à renationaliser une partie de son réseau ferroviaire.

Derrière cette volonté farouche des libéraux d’ouvrir à la concurrence l’ensemble des secteurs publics de la nation se cache en réalité un autre objectif : imposer un autre modèle de société.

Les communistes doivent être en première ligne de ce combat.

Dans le combat pour une autre société. Une société de progrès social, d’égalité, de partage des richesses. Une société où les notions d’écologies et d’humanismes prennent le dessus sur les questions de rentabilités comme de profits. Une société où la notion de justice sociale est érigée en principe.

 

 

 

Propositions :

  • Création d’une taxe Carbonne régionale (ou nationale) qui alimenterait un fond public national d’investissement destiné à la relance du fret ferroviaire public (remise en état des triages abandonnés, création de plateformes multimodales…)

 

  • Création de comités départementaux intitulés « rail public, un bien commun » composés d’élus, de cheminots, de syndicalistes, citoyens, collectifs, associations, partis politiques… Leurs buts : définir les besoins (infrastructures, dessertes, ouvertures de gares, complémentarité, grille horaire…) au plus près des bassins de vies et d’emplois.

 

  • Sortir du modèle « tout LGV » et prioriser un maillage ferroviaire de proximité au travers des trains d’équilibre du territoire et des TER.

 

  • Réorienter la politique des transports axée essentiellement vers l’objectif de service public et non de rentabilité avec à terme pour objectif la gratuité des transports en commun

 

  • Mettre fin au modèle concurrentiel et recréer une entreprise publique unique.

 

  • L’état doit s’engager à lever la dette du système ferroviaire et mettre en place des plans pluriannuels avec la SNCF (plans qui fixent objectifs et moyens)

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