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Faire de 2017 une étape pour ouvrir un nouveau stade démocratique - Lydia Samarbakhsh - 75

La France sera en élections en 2017. À nouveau. Trois scrutins – présidentielle, législatives et sénatoriales – auxquels les Français-e-s sont appelés, eux qui, élections après élections, expriment autant de colère et d'inquiétudes face à la politique gouvernementale que d'insatisfaction des institutions et des pratiques politiques. Pour nombre de nos concitoyen-ne-s, la question de « 2017 », lorsqu'elle est systématiquement réduite au « match » de la présidentielle, eh bien, une seule certitude : on ne rejouera pas 2012. Les Français-e-s ne veulent ni de Hollande, ni de Sarkozy » et massivement, ils s'interrogent, non pas sur « qui » mais sur « quelle politique ».

C'est dans cet interstice du ni Hollande-ni Sarkozy que s'est installé, d'ailleurs poussé par Hollande comme Sarkozy, un Front national dont la stratégie de conquête du leadership à droite et de prise de pouvoir progresse d'échéances en échéances. L'ultraprésidentialisation de nos institutions et les conséquences destructrices des choix gouvernementaux qui n'en finissent pas de soumettre la société française aux projets du patronat et de la finance nourrissent des rejets sans perspective et sans espoir, et d'abord à gauche. Les remaniements gouvernementaux successifs ne peuvent qu'être perçus que pour ce qu'ils sont : un mélange de basses tactiques et d'ambitions personnelles.

Le peuple de gauche, méprisé, démobilisé, désuni, se tourne vers une abstention de plus en plus large. Il a même du mal à se reconnaître tant il a été floué par trop de femmes et d'hommes d'appareil socialistes et écologistes qui sont allés de concessions en concessions au libéralisme et même à l'occidentalisme alors que le chômage progresse, que les services publics périclitent, que les divisions et les discriminations minent la cohésion nationale. Le Front de gauche dont l'existence est reconnue manque d'envergure, de capacités de rassemblement dans toute la gauche pour en devenir le cœur ce dont, je crois, il nous faut affirmer l'ambition en poursuivant le dialogue avec toutes ses composantes actuelles et y inclure toutes celles intéressées par un tel projet. Enterrer le Front de gauche avec pertes et profits reviendrait à renoncer à la responsabilité de mobiliser une majorité d'actions et d'idées autour d'un projet de gauche pour ouvrir en France un processus de transformation sociale progressiste.

62 % des partisans de gauche (et 65 % des Français-e-s) quand ils sont interrogés le disent : la politique du gouvernement n'est pas de gauche. C'est dire à quel point ce gouvernement et sa majorité parlementaire sont minoritaires et isolés à gauche, et pour cause mais le brouillage des repères n'aura pas réussi à l'occulter. C'est dire le potentiel de rassemblement, majoritaire, qui existe dans notre pays auquel doit contribuer un Front de gauche renforcé et ouvert à des forces qui aujourd'hui ne se retrouvent ni dans, ni autour d'un PS en phase de recomposition libérale. N'avons-nous pas à travailler à ce que ces millions de femmes et d'hommes s'unissent, s'engagent, retrouvent confiance en eux-mêmes et en leur capacité à changer de politique, amorcer un processus de changement progressiste profond de la société, de l'Union européenne ?

Parce que le PS au pouvoir mène une politique de droite et que la droite court après l'extrême-droite, si le mouvement populaire reste exclu du débat et des conditions dans lesquels il doit se tenir, si le mouvement populaire s'interdit de lutter, le pays peut se retrouver dans une situation à l'américaine comme les Etats-Unis ont connu jusqu'ici et que les promoteurs du bi- et tripartisme veulent installer en France : une gauche de transformation sociale éliminée durablement, éparpillée, discréditée, quand seuls les courants plus ou moins conservateurs, plus ou moins libéraux se succèdent au pouvoir. Nous avons tous une idée assez nette de ce que cela peut donner. Mais aux États-Unis précisément, ce système verrouillé est aussi maintenant confronté à ses limites.

On ne peut indéfiniment tenir le mouvement populaire hors du débat politique, ni tenir ce débat hors des préoccupations et exigences populaires, a fortiori quand il s'agit pour le peuple « de choisir une politique et ses représentants ». La campagne de Bernie Sanders – que nos médias ont négligé pour lui préférer Donald Trump – bouscule les scenarii et les codes de la politique américaine. Quel que soit le résultat qu'il atteindra, Bernie Sanders, le « socialiste », est non pas « un homme seul contre le système » mais bien la voix d'une convergence populaire (#NotMeUs) : celle qui se bat contre les bas salaires et la précarité, contre les spéculateurs qui détournent les richesses créées par les travailleurs, et les banques qui ont expulsé de chez elles des millions de familles, celle qui se bat pour la justice fiscale, l'université et l'éducation publiques, contre la privatisation de l'eau, et celle qui s'est révoltée contre l'impunité de cette police qui tire à vue sur les Afro-Américains et les discriminations d'une justice aux ordres des puissants... un « nous » qui ouvre de nouveaux horizons. Bernie Sanders n'a pas créé ce mouvement populaire, il a agi avec d'autres pour en faire un acteur du débat politique et non plus un spectateur, pour lui offrir une perspective politique de gauche.

Les luttes dans notre pays, les résistances ne sont pas inexistantes, loin de là. La question qui nous est posée est celle-ci : ces femmes et hommes auront-ils leur mot à dire aux élections ? Pourront-ils envoyer à l'Assemblée nationale la majorité dont ils auront besoin pour gagner la bataille contre l'austérité et pour la reconquête des pouvoirs ? Le mouvement social peut-il s'inviter dans le débat politique et y imposer son ordre du jour ? Que proposons-nous à ceux qui se mobilisent pour les Goodyear, les Air France, contre les coupes budgétaires, l'état d'urgence constitutionnalisée ou la déchéance de nationalité ? C'est cet objectif de mobilisation démocratique populaire que nous devons viser : la primaire peut-elle permettre de favoriser un rassemblement le plus large et massif possible à gauche ? Si elle ouvre un processus d'élaboration collective d'une plateforme programmatique offensive non seulement contre l'austérité mais pour des politiques publiques de progrès humain, social et écologique. Et de conquêtes démocratiques. Ces élections seront une étape. De quoi sera faite la France « d'après » ? La 5e République est à bout de souffle ; sa logique, le présidentialisme, poussé à l'extrême a généré une sérieuse crise de représentativité et peut la transformer en régime autoritaire. Le rassemblement qui doit se mettre en mouvement pour empêcher la droite et l'extrême-droite de conquérir le pouvoir porte en lui l'exigence d'ouvrir un nouveau stade démocratique dont il est impératif de poser les jalons. De cette dynamique d'élaboration commune, alors, en son temps, viendra le choix du ou de la candidate de la gauche à la présidentielle auquel nous pourrons apporter notre soutien.

 

Faire de 2017 une étape pour ouvrir un nouveau stade démocratique - Lydia Samarbakhsh - 75

le 12 février 2016

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