Les congrès du PCF

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Besoin de communisme, de contenus mobilisateurs pour la transformation sociale - René Fredon - 83

Dans le prolongement d'une longue période de reculs des idées et de l'influence des forces progressistes au premier rang desquelles figurait le PCF jusqu'à la fin des années 70, nous venons de vivre un moment historique avec la confirmation d'une poussée de l'extrême-droite jusqu'à devenir le premier parti de France.

 

Tandis que toutes les autres formations et notamment celles ayant exercé des responsabilités gouvernementales, à droite comme à gauche, étaient lourdement sanctionnées.

 

Sans alliances, sans élus locaux -que ceux conquis dans quelques villes et départements- sous sa seule étiquette, le parti frontiste a capté, sous ses mots d'ordres raccoleurs, racistes et sécuritaires, plus de 6 millions de suffrages, soit 27,73% des suffrages exprimés !

 

Le "sursaut républicain" au second tour barrant la route partout au FN ne fait que masquer l'inanité d'un tel scrutin et le fait que 800 000 voix de plus se sont portées sur lui au second tour.

 

Un tel résultat traduit le rejet des politiques d'austérité menées depuis trente ans par les gouvernements successifs, creusant chômage, inégalités et reculs sociaux. Jamais la méfiance n'avait été aussi grande envers les partis politiques traditionnels qui, au gouvernement, n'ont à offrir comme perspective, que la confirmation des mêmes choix néo-libéraux de privatisations, de cadeaux fiscaux au patronat, d'inégalités et de régressions sociales.

 

Comment se fait-il que les partis se situant à la gauche du PS, et qui contestent clairement ses choix découlant de son tournant libéral, n'aient pas été entendus, au contraire ils ont été eux-aussi délaissés par leurs électeurs de 2012 ? Le vote "utile" ?

 

Les communistes et la direction nationale du parti sont interpelés pour expliquer ce constat, singulièrement en France mais pas exclusivement, pour regagner la confiance populaire et faire partager les réponses à la crise profonde du capitalisme qui a fait son temps.

 

Parce que nous croyons être utiles à la société et à la lutte de classes qui s'y développe dans des conditions nouvelles encore plus difficiles.

 

Ce que nous croyons n'a d'ailleurs pas grande importance aux yeux de celles et ceux qui feignent ou qui découvrent que nous existons encore. Ce qui compte pour ce qui fut notre électorat naturel -et qui peut le redevenir-, les salariés, les chômeurs, les familles dans la souffrance et les humiliations d'une vie sans perspective, c'est ce que nous sommes capables de faire pour résister, dans les entreprises, les cités populaires, la jeunesse...en termes de solidarité concrète. Pas comme simples porteurs de la bonne parole, comme acteurs permanents du mouvement social.

 

C'est aussi la visibilité de nos propositions, de nos analyses, de nos positionnements, de notre réactivité, à tous les niveaux, à tout ce qui fait l'actualité.

 

Sans perdre de vue que la mondialisation capitaliste - ses ravages pour la planète et pour les peuples - n'est pas le fait des communistes mais la conséquence de leur affaiblissement. Aggravé par leurs divisions, leurs hésitations à se démarquer de la social-démocratie qui, ici, dès avant 1981, justifiait son alliance avec le PCF "pour lui reprendre trois des cinq millions d'électeurs qui se portent sur lui" (François Mitterrand).

 

Et je passe sur les conséquences durables de l'effondrement de l'URSS et des pays de l'Est dans l'opinion, après la révélation de ce que fut le stalinisme. Ce qui n'efface pas le bond en avant, comparé au tsarisme, de la révolution d'octobre, la part décisive du peuple russe dans la victoire sur le fascisme, dans la stimulation du mouvement ouvrier et des luttes de libération nationale à l'échelle mondiale, dans la voie ouverte au désarmement nucléaire et à la coexistence pacifique notamment.

 

Le discrédit sur la notion de communisme, confondu avec ce qui n'en était pas, fait encore des ravages. Ne serait-il pas nécessaire de rappeler que chez Marx et Engels, "le communisme n'est pas un état de choses qu'il convient d'établir, un idéal auquel la réalité devra se conformer...mais le mouvement réel qui abolit l'état actuel des choses." Sa finalité une société sans classes sociales qui sera l'oeuvre des travailleurs eux-mêmes. Sans modèle, ni prêt-à-porter.

 

On ne refait pas l'histoire mais il est utile de la garder en mémoire. On avait reculé, en France dix ans plus tôt, sur les contenus (L'actualisation du programme commun) et accepté en 1981, une sous-représentation au gouvernement (quatre ministres sur quanrante deux) puis on y est revenu dans les mêmes proportions quelques années plus tard, en 1997, (trois ministres puis deux secrétaires d'Etat en 2000 et 2001). Une mandature qui restera marquée par l'ampleur des privatisations, sous la gauche, dans la foulée de celles de Juppé et Balladur.

 

Ce n'est pas si vieux et l'électorat se souvient de la sanction électorale : Jospin, éliminé à la présidentielle de 2002 qui opposa au second tour Chirac et Le Pen (père). Comme il se souvient de notre appel à soutenir Hollande, en 2012, ce que nous ne pouvions pas ne pas faire, puis de notre opposition à sa dérive politique tout en appelant à l'union avec le PS, au plan local, pour sauver ce qui pouvait encore l'être en évitant le retour de la droite.

 

Le Front de Gauche, dont le PCF constitue l'essentiel de la force militante, après avoir fait naître de grands espoirs en 2012, au lieu de s'élargir, s'est divisé à chaque élection, selon le lieu et les circonstances locales, au détriment de tactiques et de contenus communs, avec un fonctionnement de sommet où les leaders n'étaient pas sur les mêmes longueurs d'ondes. De quoi jeter le trouble à la base.

 

Le rassemblement des forces se réclamant de la transformation sociale, de l'anti-libéralisme, demeure à l'ordre du jour. Bien plus large que l'actuel F d G. Sa solidité, son élargissement ne dépendent pas des accords de sommets entre partis politiques, focalisés sur les échéances électorales. Mais de la capacité à mettre en débat les objectifs politiques à atteindre pour sortir de la crise et les moyens financiers indissociables de l'engagement citoyen et des luttes sur tous les fronts.

 

Celui de la transition écologique étant tout aussi incompatible avec le productivisme, la course aux profits, le pillage de la planète, la réduction des inégalités, l'épanouissement de tous.

 

Je partage pleinement le point de vue exprimé par Denis Durand dans sa tribune du 21/12/15 dans l'Huma, quant à la responsabilité du parti pour tirer les enseignements de ce qui vient d'échouer et passer à l'offensive "pour ne plus refouler nos idées communistes et remettre à plus tard les confrontations de points de vue à gauche."

 

Le débat sur la constitutionnalisation de la déchéance nationale et la levée de boucliers dans toute la gauche -y compris parmi les parlementaires socialistes- peut être de nature à compromettre la recomposition en cours annoncée par Valls qui compte sur la droite pour approuver une proposition de l'extrême-droite présentée par le gouvernement socialiste !

C'est le moment, pour les groupes communistes et apparentés, de se ressaisir pour ne pas renouveler le "chacun fait ce qu'il veut" lors du vote sur l'état d'urgence.

 

S'il faut traquer sans faiblesse les criminels qui se réclament de Daesh et qui cherchent à semer la terreur sur notre territoire, doit-on s'exonérer de faire la relation de son existence avec les interventions post-coloniales des occidentaux au Moyen-Orient -dont la France-, depuis plus de 20 ans ? Comme l'a fait excellemment la déclaration du PCF du 18 novembre largement passée sous silence.

 

Ne craint-on pas d'être à contre-courant d'une opinion sous l'influence des idées sécuritaires dominantes pour expliquer le terreau propice à la radicalisation que constituent les discriminations sociales, ethniques, les stigmatisations de tous ordres fortement ressenties dans les quartiers reconnus délaissés, y compris par le 1er ministre. Ce qui n'est pas excuser les dérives meurtrières d'un petit nombre de fanatisés que le FN amagalme avec l'ensemble des musulmans.

 

L'année 2016 s'ouvre sous de sombres auspices, les grandes manoeuvres en vue de la présidentielle vont occuper tout l'espace médiatique, en martelant l'équation à résoudre : qui sera le challenger de Mme Le Pen ? Sous-entendu LR ou PS.

 

Ne faudrait-il pas, sans attendre le congrès, entamer le processus de renouveau de la vie politique et des idées et envisager une initiative ouverte à tous les citoyens et donc à toute la gauche, sans exception, simultanément dans tout le pays, pour lancer le débat sur les contenus des changements à opérer sur les plans économique, politique, social, écologique, institutionnel...

 

Pour rompre le cycle mortifère des campagnes électorales biaisées, qui font des partis des écuries au service de quelques favoris des sondages, sans aucune perspective de changements réels de politique, ce que le peuple subit depuis des lustres.

 

Et plus encore pour sortir le pays de l'ornière dans laquelle il s'enlise en faisant vivre les valeurs de la République qui n'ont de sens que dans et par la République sociale. L'apport du parti et des communistes peut et doit compter...après évaluation du contenu de nos objectifs et de nos pratiques dans un contexte national inédit et un environnement mondial des plus contrasté.

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