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36e congrès - Le texte - Il est grand temps de rallumer les étoiles

Les statuts du PCF adoptés au 36e congrès

Discours de clôture par Pierre Laurent

Journal CommunisteS n°507 - Spécial 36e congrès - 13 février 2013

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Le racisme tue... par Nicole Borvo, Sophie Celton, Cécile Dumas, Fabienne Haloui, Jérôme Marcuccini, Bozena Wojciechowski et Isabelle Lorand

Comme toujours en période de crise, les idées racistes, les discriminations, les stigmatisations… reviennent au centre du discours politique réactionnaire. Il s’articule autour de trois idées. Ils viennent nous prendre le pain de la bouche, incarné par le slogan « 1 million de chômeurs c’est 1 million d’immigrés en trop », mais aussi « nous ne pouvons accueillir toute la misère du monde ». On n’est plus chez nous dont le rejet de l’Islam fondé sur une laïcité étriquée est la partie immergée de l’iceberg. Ils sont facteur d’insécurité publique incarné hier par « Les racailles », aujourd’hui par « l’islamo délinquance ». Il est clair que le curseur idéologique s’est déplacé au cours des deux dernières décennies. Et pas du bon côté. La guerre des pauvres entre eux dont l’évacuation d’un camp de Rom a été le premier signe fort, et qui malheureusement a été suivi d’évènements comparables aux quatre coins de la France, marque une nouvelle étape. Devant cette difficulté, le parti communiste a deux options : nous recentrer sur la seule question sociale ou continuer à être porteur du communisme, un projet d’émancipation humaine, de libération de toutes les dominations. Notre proposition est de ne pas en rabattre et de rester le parti du communisme. Pour des raisons fondamentales, mais aussi pour des raisons politiques. Aujourd’hui quartiers populaires, classe ouvrière, immigrés, sont trois entrées d’un même sujet : la reconquête des catégories populaires. Combattre le FN, c’est être pleinement efficace dans la bataille contre le racisme et pour le Vivre-ensemble. Il nous faut simultanément proposer un point de vue sur la laïcité, sur les conditions de la réconciliation, et sur l’aménagement du territoire (ghettos, conditions d’accès au logement social, carte scolaire). Enfin, nous proposons d’axer cette bataille autour de trois combats : droit de vote des étrangers, récépissé contre le contrôle au faciès, et place de la diversité dans les institutions.

 

1 – L’anti-racisme au cœur de l’engagement communiste

Au plus fondamental de notre engagement communiste : la lutte contre les dominations. Notre monde s’est construit sur un postulat. Certains seraient supérieurs aux autres. Si la race1 n’existe pas en tant que réalité biologique, le racisme existe comme réalité sociale par le simple fait que des personnes se croient supérieures à d’autres, ce qui sous tendrait que d’autres seraient moins civilisés de par leur couleur de la peau, leurs origines, leur mode de vie ou leur religion. Supérieurs par leur position sociale (Empereurs, rois, riches et actionnaires), par leur genre (les hommes), par leur race (blanc). De l’antiquité à nos jours, ces trois critères ont structuré les rapports sociaux pour parvenir à l’équilibre géopolitique actuel. L’homme riche blanc est le puissant. Ainsi, le combat pour l’Egalité, la liberté et la Fraternité n’est ‘il pas réductible à une la lutte des classe. Ainsi, le racisme n’est ni réductible à un outil de division du peuple et encore moins à un leurre, c’est un pilier des rapports de domination.

Ce fait structurel n’est pas de même nature que la discrimination liée à l’orientation sexuelle. L’homophobie ou la lesbophobie tiennent autant à la perturbation insupportable du modèle de domination genrée, qu’à l’atteinte aux libertés individuelles. Le débat sur le mariage gay ne porte- t-il pas au modèle familial maman-papa…

Nous le savons bien, nous communistes, nous sommes trop souvent victimes de discriminations. Jamais de racisme. Ainsi « lutte contre le racisme » et « lutte contre les discriminations» ne sont pas équivalentes. De la même manière, être victime de discriminations est incomparable à être victime de racisme. Les victimes de racisme sont toujours victimes de discriminations. Les victimes de discriminations ne sont pas toujours victimes de racisme.

Ainsi la défiance, voire même la haine à l’égard de blancs, n’est pas un racisme anti-blanc. En ce sens que le support n’en est pas la domination.

Le combat contre le racisme est donc un sujet en soi. Pour déconstruire, il faut comprendre.

Le racisme anti arabes et noirs est le fait majeur du racisme en France. Si le colonialisme en est un élément structurant, il n’en est pas l’origine. Inutile de rappeler que l’esclavagisme est justifié en cela qu’ils concernent des sous-hommes, alors que le colonialisme, porté initialement par les plus progressistes opposés à l’esclavagisme, prétendait civiliser les populations concernées… Ce racisme remontant à la nuit des temps est le terreau qui permet aux pires idées et propositions de s’incruster dans les esprits. Il y a donc lieu à penser les leviers de la déconstruction de ce rapport à l’autre. A contrario, il génère parmi les victimes des comportements de défense, de repli, de suspicion. C’est ce couple domination-aliénation qu’il est indispensable de dépasser.

Etre victime de racisme et de discrimination ne protège pas d’être raciste à l’égard de plus faible que soit. Ainsi, les Roms avec leur sale gueule, leur pauvreté, et leur façon de vivre anormale… sont tout en bas de l’échelle. Ce n’est pas pour rien, qu’alors qu’en Europe les victimes de racisme changent en fonction des pays et de leur histoire (Turcs en Allemagne, Pakistanais en Angleterre), les Roms sont victimes dans tous les pays d’Europe. Ce n’est pas pour rien, qu’il a fallu attendre 2012 pour que le génocide tzigane perpétré par les nazis soit reconnu par l’Europe.

L’antisémitisme est une des multiples facettes de la haine de l’autre et du tous contre tous qui contamine notre société. L’antisémitisme en 2012 n’est plus celui qui a conduit à l’horreur absolue et au génocide, c’est-à-dire un antisémitisme selon des critères supposés de race. Ce n’est plus un antisémitisme institutionnel. Les ghettos, l’interdiction d’accès à certaines professions… en étaient l’incarnation. Si l’antisémitisme ne repose plus sur la théorie du complot avec tous ses archétypes, le sentiment antisémite profond (j’aime pas les juifs, c’est un juif) perdure dans trop d’esprits.

Les actes antisémites sont évalués à quelques centaines par an2. Ils sont commis par des personnes affichant leur sympathie pour l’extrême droite. Mais aussi par des jeunes de banlieue – et pas forcément des intégristes – qui manifestent leur opposition à l’Etat d’Israël dans le conflit israëlo-palestinien. Celui-ci devient l’incarnation d’une sorte de guerre de religion mondialisée.

 

2 – L’enjeu politique

A – Quartiers populaires, ouvriers, immigrés. Trois entrées, un seul objectif.

Etre la force des catégories populaires, c’est être la force politique des quartiers populaires et des ouvriers et donc des immigrés et de leurs enfants.

  • Les ZUS

4,4 millions d’habitants (7% de la population) vivent dans les 751 ZUS. Les quartiers sensibles cumulent à la fois des populations précarisées et immigrées, et parfois un environnement défavorisé. En 2008, les zones urbaines sensibles (ZUS) sont peuplées pour près de la moitié par la population majoritaire (46 %), et pour l’autre moitié par les immigrés et les enfants d’immigrés d’Afrique, Maghreb et Turc (35 %), les autres immigrés et leurs enfants (15 %), ainsi que les personnes originaires des départements d’outre-mer (DOM) et leurs enfants (4 %)3.

  • Immigration

Si plutôt que de regarder la composition des ZUS, on regarde ou habite les immigrés et leurs descendant, 19% des immigrés et 14% des descendants directs vivaient en ZUS contre 4% des autres résidents de la France métropolitaine (2008). Les descendants d’immigrés vivent donc en ZUS trois fois plus souvent que l’ensemble de la population, et les immigrés près de quatre fois plus souvent. Dans les ZUS de l’agglomération parisienne, ils représentent même 64% de la population âgée de 18 à 50 ans.

Plus de 97% des descendants d’immigrés ont la nationalité française, que ce soit en ZUS ou hors ZUS. Près d’un immigré sur quatre a acquis la nationalité française. Alors que près de neuf descendants d’immigrés sur dix se déclarent d’accord avec la proposition « je me sens Français », seulement 57 % d’entre eux en ZUS et 79 % hors ZUS se déclarent d’accord avec la proposition « on me voit comme un Français ». Ce sentiment de rejet est fortement corrélé au sentiment de discrimination.

 

  • Le travail

Tous les indicateurs utilisés pour juger de la situation des habitants des ZUS confirment la précarité de leur situation : 2,4 fois plus nombreux à bénéficier de la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC). Le salaire médian des immigrés extra européen était de 1300 € contre 1550 € chez les non-immigrés. Si les descendants d’immigrés hors UE ont un salaire presque équivalent à leur homologue non descendants d’immigrés, 40% d’entre eux font partie des 30% de salariés les moins payés. En 2009, le revenu fiscal moyen par unité de consommation de la population des ZUS s’élève à 12 345 annuels, soit 55 % seulement de celui de leur unité urbaine. Les habitants des ZUS se caractérisent par une plus grande pauvreté. En 2010, la part des personnes vivant sous le seuil de pauvreté (954 € mensuels) y est de 36,1%, un taux 2,9 fois plus élevé que celui de leur agglomération. Le taux de chômage en ZUS était à 18,6% en 2009 contre 9,8% hors ZUS.

Le type d’emploi occupé par les immigrés et les descendants d’immigrés diffère également de celui du reste de la population : aussi bien pour les hommes que pour les femmes, ils sont plus souvent ouvriers et moins souvent cadres que les autres.

Autrement dit, contre les clichés des quartiers de racailles, des zones de non droit, de l’islamo-délinquance, il ne faudrait pas tomber dans le piège du contournement. Faire l’impasse sur les quartiers populaires, pour regagner une classe ouvrière fantasmée que l’on trouverait à la porte des usines… L’ouvrier « moyen » en 2012 s’appelle Mohamed et Fatima et habite en ZUS. Pour contribuer à réhabiliter de la classe ouvrière dans l’inconscient collectif et dans l’espace public, il faut la prendre telle qu’elle est, et non tel qu’elle a été.

Ce qui est vrai c’est qu’aujourd’hui le support d’affiliation politique, d’identification de classe est plus ethnique et territorial que social. C’est surement un enjeu qui est devant nous. Mais nous l’affronterons en articulant les trois, au lieu de nier les deux premières dimensions. Et cela pour une raison fondamentale : il faut prendre au sérieux ce que les gens sont et font ; associations de quartiers, l’engagement multiforme des femmes dans la vie des quartiers, mouvements de défenses des immigrations, révolte des banlieues…

Il ne suffit pas au mieux d’aller au porte-à-porte dans les quartiers, mais de considérer que la richesse et les formes de leur politisation peuvent devenir la richesse du FDG.

En tout état de cause, un discours moralisateur sur l’unité du peuple – de surcroît vécu comme extérieur - serait totalement contreproductif.

 

B - Déconstruire les mécanismes du « racisme » ordinaire

  • Il n’y a pas d’autre voie que de déclarer la guerre aux idées reçues et de déconstruire les préjugés. La réalité : l’islam est la deuxième religion en France, 5 millions de musulmans, 12 à 15 000 Salafistes dont la majorité est piétiste, non violente, la mouvance djihadiste étant ultra- minoritaire 2 à 300 personnes qui seraient prêtes à passer à l’acte. Le sondage réalisé en octobre 2012 par l’IFOP pour le Figaro démontre que l’islamophobie (peur, déconsidération) progresse. Néanmoins, lorsque l’on regarde cette étude au prisme de l’électorat de gauche, et plus encore de l’électorat du Front de gauche, les chiffres sont plus encourageants. Pour la majorité de l’électorat de gauche, l’islam n’est pas un problème. Il faut ajouter que les habitants des zones urbaines, et plus encore de l’agglomération parisienne, résistent encore assez bien à l’islamophobie.

  • Notre réactivité sur ce thème, des Roms au pain au chocolat, est un déterminant, et même un identifiant.

 

3 : Combattre les thèmes de la droite et du FN

  • L’identité occidentale chrétienne blanche menacée par l’islam

Le débat sur l’identité nationale s’appuyait sur l’idée, que la France, et même en filigrane la culture judéo-chrétienne serait dégénérée par la présence massive de population différente. Il est faut souligner que cette idéologie marque plus souvent des populations vivant dans des zones peu marquées par la présence d’immigrants ou de leur descendance.

 

  • Le coût économique et social de l’immigration

« 1 millions de chômeurs, c’est un million d’immigrés en trop », « La France ne peut accueillir toute la misère du monde », deux slogans qui construit l’idée selon laquelle, les immigrés viennent prendre le travail des français, et même leur pain de la bouche. Alors que le différentiel entre la valeur produit par les migrants et ce qu’ils reçoivent en droits sociaux est positif de 12 milliards d’euro. Les combats communs sur le terrain social, comme PSA, mais aussi sur l’organisation du territoire (la ville partagée, mais aussi la désertification de services publics dans certaines zones rurales et périurbaines) contribuent à déconstruction de ces préjugés.

 

  • La peur du communautarisme

Le terme communautarisme a envahi l’espace médiatique, il est toujours associé aux musulmans, il permet de parler d’eux comme d’un corps étranger qui n’appartiendrait pas à la communauté nationale ou pas tout à fait, en tout cas pas loyalement. Le musulman serait ainsi l’ennemi de l’intérieur qui menace l’identité nationale et qui choisirait la vie communautaire à l’intégration.

Hors, l’assignation à résidence dans certaines cités populaires est la conséquence  à la fois des « politiques d’attribution communautaires » qui ont longtemps prévalu dans le logement social, de la discrimination dans le parc locatif privé. Cet enfermement communautaire non choisi conduit des familles « blanches » à contourner ces quartiers dans des logiques séparatistes et a aggravé le regroupement communautaire

Alors qu’un sondage réalisé par Gallup, en mai 2009, dans plusieurs pays européens confirme qu'en France 83 % des musulmans souhaitent vivre dans un environnement diversifié, seulement 4 % veulent vivre entre eux.

Si communautarisme il y a, c’est éventuellement un communautarisme d’attente, de réaction à la ségrégation, et non une construction sécessionniste. Outre que cette hypothèse tend à reporter la charge de la ségrégation sur ses victimes, à substituer aux mécanismes de la relégation un soupçon de séparatisme inavoué, elle rend tout simplement mal compte de la réalité. » (Maurin Eric).

 

4 – Les conditions de la réconciliation

Pour produire du commun, il faut respecter l’autre. En l’occurrence, respecter l’autre c’est prendre la mesure, que chaque acte est lu par lui à l’aune de son histoire et de sa propre subjectivité. Le problème n’est pas seulement ce que l’on dit, mais aussi d’où et quand on le dit. Nous les bien-pensants blancs de l’Universalisme, ne pouvons sous-estimer l’arrière-entendu de nos positions.

 

  • La laïcité et la liberté de culte

La laïcité « à la française » a eu pour principale fonction de séparer les Eglises - en fait le catholicisme - de l'Etat. Aujourd'hui, le problème a changé, il est de permettre à des religions nouvelles, et en tout premier lieu à l'islam, de trouver sa place dans notre pays plutôt que de disserter sur ce qui menacerait notre république laïque pendant que Sarkozy et son gouvernement participent à la messe du pape à Paris, que la télévision continue de célébrer chaque jour les saints et les saintes, que des personnalités politiques portent ostensiblement la croix.

Le port du voile est devenu un objet de stigmatisation et d’exclusion des femmes qui le portent, au nom d’une laïcité dévoyée, elles ne pourraient plus être déléguées de parents d’élèves ou participer aux opérations de vote, ne pourraient plus accompagner les sorties scolaires, seraient renvoyées dans l’espace privé. Les campagnes de stigmatisation ont transformé l’indifférence d’une époque en hostilité déclarée.

Nous avons besoin de réaffirmer très fortement notre conception de la laïcité alors que la droite extrême et l’extrême droite en dénaturent le sens avec une version identitaire et coercitive : une laïcité, garante de l’égalité des droits, de la tolérance, de l’acceptation des différences, du respect de toutes les croyances et religions, du refus de l’intégrisme.

Pouvons-nous essayer de décliner cette affirmation sur un certain nombre de sujet qui font débat.

Comme le préconisait la Commission Stasi, la loi de 2004 interdisant le port des signes religieux ostentatoires à l’école, aurait pu officialiser 2 jours fériés pour fêtes religieuses (l’un juif kippour, l’un musulman Aîd el Fitr) déduits du total annuel des vacances, à tort, cela n’a pas été retenu.

Le Gouvernement, en retenant seulement l’interdiction du port du foulard, a présenté la laïcité comme un outil contraignant  alors que nos principes républicains affirment qu’il ne peut y avoir deux poids deux mesures dans le traitement des spécificités religieuses et culturelles.

Dans les cantines scolaires, n’est-il pas possible d’offrir de respecter la nécessité de servir des repas protidiques en ayant comme alternative à la viande des plats à base d’œufs, de poissons, de fromage ou des protéines végétales : finis ainsi les débats sur le hallal ou le casher. 2000 enfants sont ainsi revenus dans les cantines des écoles de Lyon.

La deuxième religion de France a-t-elle le droit d’avoir des lieux de culte. Ils n’ont qu’à se les payer… alors même que l’essentiel du patrimoine de l’église catholique, classé monument historique, est entretenu par l’Etat.  Est-il tabou de débattre l’interprétation de la loi qui stipule que l’Etat doit garantir le libre exercice des cultes, sachant que c’est un financement public qui a permis la construction de la mosquée de Paris en 1920  et qu’à l’image de ce font certains maires aujourd’hui, de nombreux baux emphytéotiques ont été accordés pour les églises catholiques dans les années 30 ?

Une autre question est devant nous. Les musulmans sont français, ils veulent donc être enterrés en France conformément à leur culte. Plusieurs éléments en font partie. Enterrement en pleine terre, pour l’éternité, sans être superposés, et le visage tourné vers la Mecque. D’emblée une contradiction s’impose : la surface de terrains disponibles dans les zones fortement urbanisées. Les cimetières ne peuvent s’étendre à l’infini. Première hypothèse : on refuse les carrés musulmans dans les cimetières et on propose un cimetière musulman en zone péri-urbaine (comme ça même dans la mort, les musulmans sont ghettoïsés). Deuxième hypothèse on discute avec eux et on recherche le compromis en s’appuyant sur leur intelligence, et petit à petit on trouve des solutions.

 

  • Les associations dites communautaires

Le repli communautaire inquiète, certes. Encore qu’il y ait lieu d’évaluer le sens réel de ces associations que l’on nomme communautaires. Ce qui est réel, c’est que les arabes et les africains, mais aussi les asiatiques ou les antillais, donc les minorités visibles, trouvent plus les voies de l’engagement dans la vie publique, lorsqu’il existe un médiateur. Soit une association de la communauté, soit une personnalité. Est-ce étonnant lorsqu’il s’agit de minorités, le plus souvent dominées pendant des siècles ? Est-ce même problématique ?

Partir des gens, et construire progressivement avec eux, n’est-ce pas respecter leur mode et les conditions de leur engagement. Les Black-Panthers n’ont-ils pas été un élément déterminant de l’engagement de la communauté noire américaine dans la lutte pour les droits civiques ?

Sait-on que les associations italiennes ont connu un formidable essor après la guerre (l’immigration transalpine était alors la plus importante) ? Sait-on qu’en 1980, on recense encore 322 associations italiennes ? Envisagerait-on de les nommer associations communautaires.

Le concept de communautarisme était inexistant il y a vingt ans, il est apparu pour la première fois dans un dictionnaire en 1997, c’est aujourd’hui un mot à la mode. C’est en 2005, à l’issue d’une année dominée par la polémique sur le « voile à l’école », puis par celle sur l’« œuvre positive » de la tutelle coloniale, que le terme s’est imposé dans le débat public. Comme le souligne Fabrice Dhume, qui étudie les discriminations raciales « son occurrence comme mot clé sur le moteur de recherche Internet Google est passée de 91 100 au 3 mai 2005 à 634 000 au 30 mars 2006, et 1 030 000 au 3 mai 2007 »...

 

5 : Les leviers de l’unité du peuple

Certaines batailles spécifiques sont des leviers idéologiques au-delà de leur légitimité morale : droit de vote des résidents étranger et récépissé contre le contrôle au faciès.

 

  • Droit de vote des étrangers :

Pour les immigrés et leurs descendants : c’est à la fois de l’ordre de la reconnaissance mais aussi de celui de la réparation. Faut-il rappeler que dans l’Algérie colonisée, le musulman n’avait pas le droit de vote.

Réhabiliter une autre idée du migrant. Ce n’est pas une nébuleuse étrange et dangereuse, ce sont des personnes avec des visages et des histoires, qui vivent en France, qui travaillent en France, qui paient leurs impôts en France, et donc qui participent de la vie démocratique. De ce point de vue, la lutte des travailleurs sans papiers et RESF ont été très positifs.

 

  • Récépissé :

Acte majeur et quotidien de la discrimination et de la stigmatisation, le contrôle au faciès humilie les victimes et leurs proches au quotidien. Décision exclusivement politique, engagement de campagne de Hollande, identifiant de gauche, c’est une bataille gagnable. C’est aussi l’occasion de parler sur la police républicaine (réconcilier le peuple et la police). Crée au détriment de la police de proximité, la BAC est à bout de souffle. L’affaire marseillaise en est la partie visible de l’Iceberg. Alors que la puissance publique devrait être un facteur d’apaisement et d’unité du peuple, la substitution de la police de proximité par la BAC a produit les pires effets, les pires dérives dont les contrôles au faciès ou les bavures sont la partie immergée de l’Iceberg. La fracture entre la police et les quartiers est un symptôme préoccupant, un facteur aggravant de la fragmentation sociale. Pour remettre de la tranquillité publique, de la sureté, nous devrions prendre position pour la dissolution de la BAC et l’investissement massif dans la police de proximité.

 

  • Bataille pour éradiquer le mot Race du vocabulaire institutionnel porté haut par les parlementaires communistes.

Ces trois batailles ne sont pas contradictoires avec la régularisation des sans-papiers et la solidarité avec les Roms. Elles ne sont pas sur le même registre. Régularisation et Roms sont, par principe, essentielles. Elles portent sur l’égalité, la liberté et la fraternité, mais aussi sur l’Europe, le monde, les frontières… Mais elles concernent les migrants et non les citoyens français ou les résidents étrangers vivant en France, notamment dans les quartiers populaires.

Nous sommes radicalement opposés aux statistiques ethniques et à la discrimination positive (politique de quotas). Pour autant, il semble nécessaire de recourir aux statistiques de la diversité d’origine territoriale qui, à la différence des statistiques ethniques, cherchent à savoir si des personnes de même sexe et même âge, d'un milieu social comparable, et de qualification de même niveau, voient leurs chances se réduire du fait de leurs origines qui s’identifient au lieu de naissance d’un parent ou d’un grand parent. Ce sont des enquêtes conformes à notre constitution : l’étude de l’Insee qui vient d’être publiée, en octobre 2012, découle de cette démarche et prouve que c’est nécessaire.

C’est avec une forte volonté politique qu’il faut envisager la bataille du rétablissement de l’égalité car ce sont sur des temps longs que reculeront durablement et réellement le racisme et les discriminations.

Stigmate majeur des discriminations, la présence marginale des enfants de l’immigration au cœur de la République : les institutions.

Point n’est besoin de calculs élaborés pour voir que l’assemblée nationale n’est pas aux couleurs de la France. Nous devrions être le parti des élus à l’image de la société telle qu’elle est dans sa diversité. Il s’agit d’un parti pris, d’une décision politique. Un soin particulier devra être porté sur la constitution des listes municipales, non seulement au premier tour, mais aussi après « l’écrémage du second tour », dans les exécutifs municipaux et parmi les conseillers communautaires. Plus généralement, nous affirmons que le non cumul des mandats et leur limitation dans le temps, facteur de rotation, produirait de fait de la mixité parmi les élus.

Conclusion : Devenue centrale dans la vie politique, la lutte contre le racisme et les discriminations appelle de nous à la fois d’en maitriser les mécanismes, de dégager des prises de positions sur les questions telles qu’elles se posent à la société, d’évaluer l’état de l’opinion publique, et d’envisager les leviers et les formes de mobilisations, pour faire bouger les lignes.

1 Le mot race devrait disparaître, car il n’y a pas de race dans l’espèce humaine, il y a le genre humain. Cette bataille a fait l’objet d’une proposition de loi des députés et des sénateurs communistes.

2 En 2011, 389 actes ou menaces ont été recensés, contre 466 en 2010. Ce qui fait dire à Ariel Goldmann, vice-président du Crif et porte-parole du SPCJ, que "depuis dix ans on est systématiquement à plus de 300 actes par an". Depuis le début de l'année 2012, et surtout depuis l'affaire Merah en mars, les chiffres flambent : fin mai, déjà 268 actes répertoriés, dont 78 actions violentes (dégradations, violences sur personne) et 190 menaces et actes d'intimidation (tracts, tags, injures).

3 Jean-Louis Pan Ké Shon La ségrégation des immigrés en France : état des lieux Population & Sociétés n°477, avril 2011

 

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le 07 January 2013

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