Les congrès du PCF

Les congrès du PCF
Accueil
 

36e congrès - Le texte - Il est grand temps de rallumer les étoiles

Les statuts du PCF adoptés au 36e congrès

Discours de clôture par Pierre Laurent

Journal CommunisteS n°507 - Spécial 36e congrès - 13 février 2013

Restez informé-e

Chaque semaine, un point sur les initiatives et les débats en lien avec le congrès.

Recevoir la lettre du 36e Congrès

 
 
 

Le PCF et l’enjeu du travail par Thomas Lermusiaux

Disons-le tout de suite, la base commune proposée par le CN dans le cadre du 36ème Congrès marque une avancée dans la réflexion du PCF sur le travail. En particulier, la définition proposée comme le « droit de chacune et chacun à se réaliser, à participer à l’effort commun au service de la collectivité en fonction de ses moyens », porte en elle bien plus que ne le développe le texte par la suite. Les travailleurs (même s’ils ne sont même pas nommés dans le texte !) apparaissent comme ceux « qui produisent au quotidien les richesses ».

Malheureusement, ces pensées sont noyées au milieu d’autres développements rhétoriques, dispersées sans aucun ordre apparent. Et finalement il apparaît que la question du travail est loin d’occuper la place centrale qu’elle devrait avoir dans nos réflexions et nos actions quotidiennes. Mais pourquoi le travail devrait-il être au cœur et à la base d’un projet communiste émancipateur ? Et puis concrètement, comment cela pourrait-il (devrait ?) se vivre au sein du PCF ?

 

 

  1. La question du travail, pierre angulaire du projet communiste

1.1 Une approche économique par un non-économiste

 

Si le communisme trouve ses racines au plus profond de la philosophie antique, des jacqueries paysannes du Moyen-âge, de la Révolution Française, témoins de la lutte des classes et de la volonté du mieux vivre en commun, le communisme « moderne » naît de la Révolution industrielle et des intuitions de Marx sur le capital et le travail. Il est d’ailleurs frappant qu’aujourd’hui, le projet de base commune ne parle que des « pouvoirs des marchés financiers » et de « l’argent sans conscience » pour dénoncer le capitalisme. Pourquoi ne revient-on pas à la définition simple, validée et reconnue par tous (même les non-communistes) ? Le capitalisme, c’est la propriété privée des moyens de production. Car c’est de cette définition que naît le « contre » projet communiste !

Partons du postulat que seul le travail est créateur de richesse. Pour cela, prenons le travail au sens large, c’est-à-dire que toute activité de production de biens, de savoir est un travail, même si elle est gratuite en termes monétaires. De la même façon, prenons le terme richesse au sens large (de la valeur mesurable par la monnaie, à l’enrichissement intérieur, en passant par toutes les richesses symboliques créées par l’homme). On voit tout de suite que la nature n’est pas une richesse intrinsèque, mais un outil au service de l’homme, outil à protéger pour offrir les mêmes « chances » aux générations futures. De la même façon, le capital est un outil. Il ne peut pas (et même il ne doit pas, car c’est alors de la spéculation) créer de richesse par lui-même. Il a besoin d’un travail préalable. La Révolution industrielle a brisé cet « équilibre » en rendant la part du travail dans le capital presqu’invisible. Aujourd’hui encore, quand le PDG de Nikkon parle de créer une usine sans travailleurs avec uniquement des robots-machines, on cache habilement aux yeux des travailleurs que sans eux cette usine n’existerait pourtant pas (il faut bien du travail pour fabriquer des machines, mais surtout il faut aussi du travail pour pouvoir acheter des objets produits par des machines).

Les moyens de production (le capital) ne peuvent donc qu’appartenir aux travailleurs et plus largement à toute la collectivité, car ils sont issus du travail et de la collectivité. Quand on les privatise, il faut les rémunérer, et ce presque toujours avec du travail d’autrui (les artisans et agriculteurs échappent à cette « contradiction »). C’est le début de l’exploitation et par là de la lutte des classes. Le communisme, c’est donc la réappropriation collective des moyens de production afin d’éradiquer la notion même de « capital » qui s’oppose au travail. Et pour faire « vieux-jeu », le socialisme c’est cette étape intermédiaire, où petit à petit, nous sortons du champ marchand capitaliste toutes les activités qui le nécessitent.

Si sur les lieux de travail, nous ne parvenons pas, par un lent et patient travail de terrain, à faire prendre conscience du pouvoir révolutionnaire et émancipateur de ceux qui produisent, le combat contre le capital est perdu d’avance. Et l’idéal communiste ne peut que s’éloigner. Et il ne suffira pas d’un pôle public financier noyé au milieu des requins, ou d’une BCE au service des peuples pour renverser le capitalisme.

 

 

  1. Une approche sociale par un non-sociologue

 

Le travail est constitutif de l’être humain. Le capitalisme, après s’être approprié la main de l’homme s’approprie de plus en plus son esprit. En faisant du travail un coût, tout perd sens. Celui qui se lève tôt le matin pour aller travailler a l’impression que ce qu’il fait ne sert à rien puisqu’il coûte à la société. Ce qu’il produit lui est caché. Ce qu’il ne produit pas par rapport à l’ouvrier chinois lui est montré tous les jours. Pire, dans certaines activités, on lui fait produire quelque chose qu’il sait nuisible à la société. Quant à l’absence de travail… La société capitaliste a réussi à dissocier travail et consommation. Mais les deux sont indissociables ! Les privés d’emploi (et bien souvent de travail) l’ont bien compris, et le vivent douloureusement dans leur chair, jour après jour.

Le travail n’est pas l’emploi. Cette distinction est fondamentale car autrement elle nous enferme dans des batailles pour l’emploi au lieu d’une guerre longue pour le travail. L’emploi, c’est dans la société capitaliste le rôle qu’est prêt à vous donner le capitaliste en échange de votre force de travail. Il marque la subordination et l’utilisation du travail du plus grand nombre pour satisfaire les besoins d’une minorité

Le travail est un facteur essentiel de la socialisation au même titre que l’école. Il est un facteur décisif dans la conscientisation de classe. Nous l’avons vu, le capitalisme avance de plus en plus souvent masqué. Mais il ne sait pas encore se « cacher » lorsqu’un patron refuse toute augmentation de salaire, accélère les cadences de travail, méprise ses salariés. Même le travail émietté, divisé, précarisé qui se développe de plus en plus (sociétés de nettoyage, sous-traitance) peut conduire à des victoires émancipatrices sur le capital (luttes des sans-papiers par exemple). Ce travail individualisé, dé-spatialisé, rend plus difficile la rencontre avec le travailleur sur un lieu de travail, mais il ne change pas le ressenti de ce dernier vis-à-vis de l’exploitation capitaliste. Ainsi, on veut souvent opposer les défenseurs de l’activité communiste sur les lieux de travail avec l’activité dans les quartiers populaires. Mais il n’y a pas d’opposition, ni de contradiction ! A condition que l’on parle aussi du travail sur les lieux d’habitation…

 

 

  1. L’activité communiste sur les lieux de travail

2.1 Une priorité dans l’action

 

Dans le paragraphe précédent, il est expliqué pourquoi nous prenons le terme « lieux de travail » au sens large. L’important n’est pas toujours le lieu physique de la rencontre (même si sur des territoires comme l’aéroport de Roissy-CDG, c’est une nécessité absolue). L’important c’est le message passé lors de la rencontre. On peut aborder un citoyen sur la vie chère (on s’adresse plus au consommateur), sur une élection (on s’adresse plus à l’électeur), sur l’école (on s’adresse plus au parent)… Mais lorsqu’on aborde un citoyen en tant que travailleur, on peut dépasser nos messages trop souvent défensifs et par la prise de conscience donner l’envie d’être offensif sur des questions décisives comme le partage des richesses et la notion de propriété. Ce n’est pas simple. Vingt-cinq de contre-révolution idéologique libérale laissent des traces, souvent sur les plus jeunes à qui il nous est difficile d’évoquer un passé où « c’était mieux »… Mais c’est indispensable.

On nous rétorquera que c’est le rôle des syndicats de gérer ces questions du travail. Bien évidemment, les syndicats ont un rôle essentiel dans les luttes mais aussi dans les réflexions sur ces questions. Mais, pour pouvoir montrer sans savoir bien l’expliquer, la différence entre un parti politique visant à l’émancipation sociale des travailleurs et un syndicat, je prends souvent l’exemple d’une usine d’armement. Si les ventes d’armes plongent soudainement et que le patron capitaliste veut restructurer alors que les années précédentes les dividendes étaient largement distribués, c’est le rôle des syndicats de se battre pour l’emploi, de dénoncer le vol opéré par le capital. Mais sérieusement, serait-ce le rôle du PCF ? Le parti devrait pouvoir expliquer la nécessité d’un contrôle public de la production d’armement (c’est-à-dire une nationalisation) et à terme la disparition de cette activité humaine destructrice, sans pour autant remettre en cause les travailleurs du secteur. C’est leur emploi qu’il est difficile de « défendre », alors qu’en revanche leur humanité dans leur travail, c’est ce qu’il faut préserver.

Le PCF doit donc se donner les moyens humains et financiers de relancer l’activité sur les lieux de travail. Si cette priorité n’est pas actée dans le cadre du Congrès, ceux qui au quotidien essaient de faire vivre cette idée (je pense aux sections et cellules d’entreprise) continueront à voir leur forces décliner. Car le militantisme à l’entreprise est par définition ingrat, sans résultats à court-terme, sans mesure électorale de son efficacité. A l’heure où le « Tout, tout de suite » libéral gangrène la société (c’est-à-dire aussi un peu nous-mêmes, les communistes), comment reprendre la maîtrise du temps long de l’Histoire sans une volonté forte partagée par le plus grand nombre ?

 

 

  1. Une priorité dans l’organisation

 

Aujourd’hui, au sein du PCF, les questions du travail sont trop souvent déléguées à la section « économique » du parti. Finalement, le Figaro a gagné puisque les pages « Travail » de son journal sont depuis des années dans les pages saumon du Figaro « Economie »… Nous avons essayé de démontré que le secteur « travail » est un secteur à part entière. La pensée économique doit être au service de la société, mais elle ne saurait être une fin en soi. La question de la citoyenneté qui se profile derrière toute notre réflexion sur le travail est une question cruciale à laquelle il nous faut répondre. Le vivre ensemble passe d’abord par l’envie de travailler pour les autres et de toucher en échange de cela une compensation (monétaire mais aussi non monétaire comme tous les services publics gratuits) juste et égalitaire. Le droit au travail est un devoir de citoyen.

Au sein des sections, des fédérations, de la direction nationale, le recensement de toutes les forces prêtes à s’investir dans ce projet de société basé sur la conscientisation des travailleurs est un préalable indispensable. Il faudra ensuite construire pas à pas un projet qui parle réellement aux gens. La notion de nationalisation est à redéfinir, mais une fois ce travail fait, elle doit être portée fièrement par les communistes. De même, face aux méfaits du libre-échangisme, fermer les yeux sur des solutions temporaires comme le protectionnisme, qui ont le mérite d’être claires pour tous les travailleurs menacés de délocalisation parce qu’ils « coûtent » trop chers, est une erreur politique. Soyons ambitieux et à l’écoute de la souffrance actuelle au travail. Ne laissons plus le capitalisme mondialisé dicter ses règles du jeu !

 

Thomas Lermusiaux

Secrétaire de la section de Roissy-Aéroport

 

Il y a actuellement 0 réactions

Vous devez vous identifier ou créer un compte pour écrire des commentaires.

 

le 07 November 2012

    A voir aussi